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nients ; il retomberait exclusivement sur les gros capitaux.

On en trouve la preuve dans les législations d’Athènes, de Rome, de Florence et de l’Angleterre, où les petits capitaux et les petits revenus ont dû être exemptés de concourir à l’impôt. Les exemples empruntés à Athènes pour les liturgies, les triérarchies, à Florence pour la sostanza, sont topiques. Il en résulterait deux faits : 1° le non concours des classes les plus nombreuses à l’impôt, tandis qu’elles prélèvent une part de plus en plus grande dans la production ; 2° la forme progressive de l’impôt unique. On doit considérer ces conséquences comme fatales. Elles conduiraient elles-mêmes à un très rapide appauvrissement dés peuples qui tenteraient cette expérience, parce que tous les capitaux mobiliers tendraient, ce qui a eu lieu à Athènes, à Florence et en Hollande, à se transporter ailleurs. Le transport des capitaux présentait autrefois des risques, il offre actuellement des bénéfices.

Sans doute les États-Unis retirent chaque année 1700 millions de l’impôt sur le capital, mais les comparaisons entre les États-Unis et tout autre peuple, placé dans des conditions différentes, sont dangereuses. D’abord, l’impôt sur le capital est loin d’être unique aux États-Unis, puis il se lève sur un territoire immense, fertile, où accourent les capitaux et les populations du monde entier et où se réalisent des plus-values inconnues aux autres nations.

Entre les récentes théories sur le caractère général et l’incidence de l’impôt, celle qui demanderait à la rente foncière et, par extension, à tout fait de rente, la tache de pourvoir à l’ensemble des dépenses de la plupart des États est la plus favorable, naturellement, à l’impôt unique ; on peut, par suite, signaler dans les réformes de l’Assemblée constituante une certaine tendance vers l’impôt unique, puisqu’elle n’eut, en définitive, recours qu’à l’impôt direct avec de très légères taxes douanières.

Quant aux deux autres théories : l’égalité de sacrifices et la compensation légitime à l’inégalité dans la répartition de la production : la première est contraire à toute idée d’impôt unique à raison même de son principe. Quant à la seconde, ceux qui en sont les principaux promoteurs n’ont pas eu l’espoir de refondre la société, au moyen de l’impôt. Pour eux, l’impôt est inhérent, sous ses diverses formes, à cet état social qu’ils condamnent. Mais cette refonte pouvant exiger de longs délais, ils se contenteraient soit de l’impôt sur le capital, soit de l’abolition des impôts indirects, le tout en vue d’exonérer les classes laborieuses de tout impôt. Cette exonération, poursuivie systématiquement, suffirait à elle seule pour produire, avec le temps, une révolution économique, par l’appauvrissement de la société, plutôt qu’une révolution sociale.

Il suffit, en effet, de jeter un coup d’oeil sur l’histoire des classes laborieuses, dont l’émancipation est un fait récent, pour reconnaître deux faits qui dominent la condition fiscale des États appartenant au courant delà civilisation contemporaine : 1° Les classes laborieuses, à raison de l’importance des salaires, possèdent actuellement une partie du capital national. 2° Néanmoins elles sont hors d’état de suffire à l’entretien et à l’accroissement de ce capital, conditions essentielles au développement de la société. Par suite, il n’est ni juste ni possible d’exonérer les classes laborieuses de leur part dans l’impôt. Toutes les considérations d’incidence doivent être ramenées à ces deux faits. La variété, la multiplicité, la nouveauté, le remaniement perpétuel des impôts, n’ont pas d’autres causes. Les impôts doivent être incessamment mis en rapport avec l’état social, c’est ce qui réduit la théorie de l’impôt unique à n’être, non pas au point devue fiscal pour lequel elle ne compte même pas, mais au point de vue scientifique, qu’une chimère. Elle ne forme même pas un idéal ; elle est en contradiction avec la nature de l’humanité,- son milieu et son développement.

On peut même affirmer que c’est plutôt àr l’origine des États et des civilisations qu’il y a quelques chances de rencontrer une forme quelconque de l’impôt unique, telles que la capitation, la rente en nature, le don volontaire ; mais, au fur et à mesure que la civilisation se développe, que les conditions de l’humanité se diversifient, se compliquent, l’impôt, précisément en vue de la justice’ sociale et d’une moins mauvaise répartition,

— formules qui se ramènent facilement à. l’égalité de sacrifice et à une meilleure répartition de la production, — se diversifie, se complique, se multiplie lui-même, ainsi que le fait a eu lieu, en Egypte, à Athènes, à Rome, et comme c’est chaque année davantage le cas depuis J789, chez tous les peuples. . L’impôt sur le revenu.

Il y a une distinction à faire entre les formes de l’impôt sur le revenu. Ou bien l’impôt est assis sur une appréciation en bloc du revenu, c’est le cas de l’impôt sur les revenus en Prusse.

Ou bien il est assis sur une appréciation