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les plus nombreuses résultent la multiplicité, la variété des formes de l’impôt, la légitimité des impôts indirects, la légitimité des taxes de consommation, pourvu qu’elles ne se portent pas sur les objets nécessaires à la vie, même des octrois, dans les mêmes limites.

Sans les taxes de consommation, les États actuels ne pourraient pas vivre.. II. RÉSULTATS DE L’ÉTUDE DES THÉORIES FISCALES.

. Coup d’oeil d’ensemble sur le développement des théories.

Si l’on fait exception d’Aristote, on peut dire que l’on ne trouve dans les historiens ou philosophes de la Grèce et de Rome que des renseignements épars sur l’impôt ; aucune théorie n’est formulée ; on le considère comme un fait. Tacite, cependant, à propos de certaines délibérations du Sénat, qui portaient sur des intérêts si nombreux et si - différents, laisse entrevoir que les problèmes d’incidence commençaient à éveiller la curiosité.

Il faut . parvenir jusqu’à Machiavel pour rencontrer, non pas une théorie de l’impôt, mais une appréciation politique des effets de l’impôt à Florence.

En réalité, Bodin, Child, Davenant, Locke, ont eu les premiers une théorie fiscale ; ils se sont proposé de rechercher quels pouvaient être les effets sociaux de l’impôt. Il est tout naturel qu’ils se soient demandé si l’impôt ne demeurait pas à la charge de la propriété foncière, qui était à leur époque l’élément principal de la production et de la richesse. L’idée que l’impôt pouvait être en partie à la charge des travailleurs devait leur être étrangère.

. Parallélisme entre les faits sociaux et les théories fiscales.

, Les théories fiscales ont suivi une direction exactement parallèle à l’évolution des faits sociaux. Elles sont demeurées inconnues à ces milieux étroits, fermés, essentiellement aristocratiques des sociétés antiques. Dans ces sociétés, Faction prévalait ; ■si des changements avaient lieu dans les institutions fiscales à la suite de modifications -sociales, ils n’étaientpas précédés de systèmes ilscaux spéculatifs.

Aussi n’est-ce qu’au terme de l’évolution de ta condition des classes laborieuses, dans lesquelles rentraient, du xvi e au xvin e siècle, une grande partie des classes moyennes, que les théories fiscales ont pu apparaître, que dos publicistes ont dû avoir l’idée de poser .cette question : Sur qui retombe l’impôt ?


INCIDENCE DE L’IMPOT

Locke répondit le premier avec clarté ; il retombe sur les propriétaires. Les propriétaires doivent faire face à toutes les charges sociales.

C’est la doctrine des physiocrates ; toutefois les physiocrates donnent beaucoup plus d’importance que Locke aux autres éléments sociaux. Entre eux et Locke le progrès est considérable ; nous sommes en plein xvni* siècle. L’industrie, le commerce, ne sont que des intermédiaires. Restent, les travailleurs : que leur prendre, avec des salaires misérables ?

Donc, tout retombe sur les propriétaires, 

qui seuls ont un revenu réel. Si les physiocrates avaient enseigné le contraire, ils n’auraient été suivis par personne.

Au xvm e siècle, le témoignage de Voltaire l’atteste, l’opinion publique considérait le travailleur, le salarié, comme condamné à une condition irrémédiable, réduit à un strict nécessaire, et impuissant à supporter aucun impôt ; c’était la tradition de l’ancienne servitude du travail.

La théorie physiocratique a provoqué la contradiction. Son action a été en cela de plus en plus heureuse ; elle a imprimé -aux sciences économiques un véritable élan. Quesnay, Forbonnais, Adam Smith, ont pu commencer l’analyse du salaire et des véritables éléments de l’impôt.

Même parallélisme, quant à la doctrine de Ricardo. Ricardo ne s’occupe pas de l’émancipation sociale des travailleurs, mais de leur émancipation économique. Il écrit à une époque où la concentration des ateliers, le développement de l’industrie mécanique, l’accroissement de la population, concourent, avec de longues guerres et les taxes excessives, qui en sont les conséquences. Le travailleur paraît accablé ; sous ces diverses influences, il est fatalement confiné à sa condition. Que lui importent les taxes sur le blé Il est réduit au strict nécessaire. L’industriel, le manufacturier, le capitaliste qui l’emploient, qui représentent les nouvelles forces sociales, supporteront l’impôt. La différence était sensible entre cette théorie et la théorie physiocratique, mais elle ne fait que mieux apparaître le parallélisme. Puis, après bien des efforts, les travailleurs s’émancipent économiquement ; d’autres théories correspondent alors à cette émancipation. La première est celle des protectionnistes qui, en vue des avantages particuliers qu’ils s’attribuent au moyen d’impôts de douanes, affirment que les travailleurs n’en supportent aucune partie, parce qu’ils s’en reçu* pèrent par la hausse des salaires. Cette théorie a exercé et exerce encore :