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Pitt fut de nouveau chargé de former un cabinet. Mais l’état de sa santé ne lui permettait pas de supporter le poids de la direction des affaires et il ne se réserva que le poste de garde des sceaux. C’est à cette époque qu’il fut appelé à la Chambre des lords avec le titre de comte de Chatham. A la fin de 1768, ses infirmités et sa désapprobation à l’égard des mesures prises au sujet de l’Amérique le déterminèrent à abandonner le ministère. Il combattit, à diverses reprises, à la Chambre des lords, la ligne de conduite adoptée vis-à-vis des Américains et en prédit les conséquences désastreuses, notamment la guerre avec la France et l’Espagne. Mais lorsqu’il apprit qu’on devait discuter à la Chambre des lords une motion tendant à reconnaître l’indépendance des colonies révoltées, il se fit porter au Parlement, malgré ses souffrances, pour s’élever avec indignation contre ■une proposition qui tendait au démembrement de la monarchie. Le discours qu’il prononça acheva de l’épuiser ; il s’évanouit au milieu de la séance (7 avril 1778). Transporté à sa maison de campagne de Hayes (comté de Kent) il j mourut un mois après, le 11 mai 1778. Pitt (William), second fils de lord Chatham et de lady Esther Grenville, naquit à Hayes (comté de Kent) le 28 mai 1759. Son père qui l’aimait tendrement et qui voulait le préparer à la carrière parlementaire, le fit ■élever chez lui jusqu’à l’âge de quatorze ans ; à cette époque, il l’envoya au collège de Pemibroke-Hall, à l’université de Cambridge. William Pitt quitta l’université en 1780 et se ’fit admettre au barreau ; la même année, il se présenta aux élections, comme candidat pour l’université de Cambridge, mais il ne réunit -qu’un petit nombre de voix ; il ne tarda pas néanmoins à entrer au Parlement ; grâce à la recommandation du duc de Rutland, il fut «élu, en janvier 1781, par le bourg d’Appleby ■dont disposait sir James Lowther. Son premier discours suffit à le placer au rang des premiers orateurs de la Chambre des communes ; en 1782, il accepta les fonctions de chancelier de l’Échiquier dans le cabinet dirigé par Shelburne. Quelques mois plus tard, .au commencement de 1783, le ministère Shelburne succomba sous la coalition des partisans de lord North et de Fox, et Pitt, ayant •refusé de conserver ses fonctions dans le nouveau cabinet, mit à profit ses loisirs pour faire un voyage en France. Au mois de novembre 1783, Fox présenta au Parlement un bill sur l’Inde ; cet acte avait pour objet d’enlever l’administration de la colonie à la Compagnie des Indes et de la remettre aux mains -d’une commission nommée par le Parlement et ne pouvant être révoquée que par lui ; ce projet fut considéré par le roi comme une atteinte aux droits de la couronne et par l’opinion comme un instrument de parti à l’aide duquel les wighs alors au pouvoir voulaient étendre et perpétuer leur puissance ; combattu par Pitt, il fut adopté néanmoins par la Chambre des communes, mais il échoua à la Chambre des lords. Le roi dont l’intervention avait amené cet échec en prit prétexte pour renvoyer le ministère et appela Pitt au pouvoir. Nommé le 18 décembre 1783 premier lord de la Trésorerie et chancelier de l’Échiquier, Pitt devait rester premier ministre, sans interruption, pendant dix-sept ans.

Cette longue période comprend deux parties très distinctes ; de 1784 à 1792, Pitt relève la situation de l’Angleterre épuisée par la guerre d’Amérique et ses réformes financières contribuent à donner à son pays une prospérité jusque-là inconnue ; de 1793 à 1801, contraint d’entrer en lutte avec la France, il engage la guerre à regret mais la poursuit avec énergie et conserve la confiance inébranlable du Parlement et de la nation anglaise en dépit des alternatives de succès et de revers qui marquent le cours des hostilités et des sacrifices énormes qu’exige le soutien de la guerre.

Lorsque Pitt arriva aux affaires, un emprunt était nécessaire pour faire face aux engagements échus et aux besoins des services ordinaires ; les emprunts antérieurs avaient été négociés à l’amiable entre le chancelier de l’Échiquier et les souscripteurs ; ce procédé offrait au parti au pouvoir un moyen facile d’accroître son influence au détriment des intérêts du Trésor. Pitt, résolu à supprimer un tel abus, mit l’emprunt en adjudicar ’ tion publique et l’adjugea au concurrent qui se contentait du plus faible intérêt (V. Crédit public et Emprunts publics) ; cette forme devint le type de presque tous les emprunts qu’il eut à contracter dans la suite. La contrebande causait au Trésor un préjudice considérable ; sur la proposition du premier ministre, des mesures répressives furent édictées pour intimider les fraudeurs, et les taxes de douane furent considérablement abaissées ; les droits sur le thé notamment furent réduits de 50 p. 100 à 12 1/2 p. 100 ; les bénéfices de l’importation clandestine ayant ainsi singulièrement diminué, la contrebande disparut en grande partie. L’accroissement de la dette publique dû à la dernière guerre, excitait de grandes craintes ; le chiffre élevé qu’elle avait atteint faisait redouter qu’en cas de complications il devint impossible au Trésor de tenir ses engagements ou de trou-