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PHYSIOCRATES

PHYSIOCRATES

PHYSIOCRATES.

SOMMAIRE

. Origine et signification des mots physiocratie, physiocrates.

. Résumé de l’histoire de l’école physiocratique. "3. Bases du système physiocratique. . Conclusions optimistes des physiocrates. . Les théories de la classe stérile, du produit net et de l’impôt unique.

. Vues politiques des physiocrates. Services qu’ils ont rendus.

Bibliographie.

. Origine et signification des mots physiocratie, physiocrates.

Le mot physiocratie se trouve, pour la première fois, en tête d’un recueil d’œuvres de Quesnay, publié par Du Pont de Nemours en 1767 ; il était expliqué ainsi : Physiocratie ou Constitution naturelle du gouvernement le plus avantageux au genre humain. Un distique que Quesnay avait composé et qui servait d’épigraphe au livre, complétait l’explication :

Ex naturâ, jus, ordo et leges ; Ex homine, arbitrium, regimen et coercîtio. L’auteur de la physiocratie voulait donc constituer un système de gouvernement basé : non sur l’arbitraire, la réglementation et la contrainte de l’homme, mais sur la nature (çû«ç) f d’où dérivaient le droit, l’ordre, les lois véritables.

Ce serait une erreur de chercher, ainsi qu’on Ta fait quelquefois, une relation entre le mot physiocratie et la doctrine d’après laquelle la terre serait la source unique des richesses. Les physiocrates ont soutenu cette doctrine, mais elle n’est qu’une des parties de leur système et non la plus importante, ainsi qu’on le verra plus loin. Le mot physiocrate est moins ancien que le mot physiocratie. On le rencontre pour la première fois dans une notice rédigée par Du Pont de Nemours et insérée par Peuchet dans le discours préliminaire de son Dictionnaire de géographie commerçante (1799). Jusque-là les partisans de la physiocratie étaient appelés économistes.

Dans sa notice, Du Pont de Nemours comprenait uniquement parmi les physiocrates les disciples avérés de Quesnay, c’est-à-dire Mirabeau le père, Le Mercier de la Rivière, Abeille, Le Trosne, Saint -Peravy, Vauvil-Hers, Roubaud, l’abbé Baudeau et lui-même. Il citait Morellet, Saint-Lambert et Turgot, mais pour constater que, s’ils appuyaient les doctrines, ils désavouaient les économistes. Aujourd’hui, on donne au mot physiocrate un sens un peu plus étendu et on l’applique assez ordinairement à tous les écrivains du xvm e siècle qui ont accepté ou défendu lesidées contenues dans la Physiocratie. Du Pont de Nemours a contribué à cette extension en s’efforçant, dans les dernières annéesde sa vie, de ramener toutes les théorieséconomiques à une seule origine, celle de son école, et de rassembler dans un unique faisceau tous les économistes de son temps depuis Quesnay et Gournay jusqu’à Jean-Baptiste Sayet Sismondi, en passant par Adam Smith.. C’est sous l’empire de cette préoccupation qu’il a écrit la Note sur les économistes, placée en tête de l’Éloge de Gournay dans les œuvresde Turgot, note souvent reproduite ou citée, et dans laquelle sont énumérés non seulement les disciples de Quesnay (les mêmesque ci-dessus), mais les disciples de Gournay (voy. ce nom) et les personnages qui ont. aidé ou protégé les physiocrates : Bouvard de Fourqueux, Bertin, le comte Chreptowicz (chancelier de Lithuanie) , le margrave de Bade-Charles-Frédéric et l’empereur Léopold. Il serait excessif de considérer tous les noms de cette liste, notamment le dernier,. comme appartenant à des physiocrates ; Du Pont a d’ailleurs omis de citer plusieurséconomistes dont le rôle, il est vrai, n’a été que secondaire ; par exemple, Butré, le comte d’Albon, le chevalier de Vivens, Clicquot-Bervache ; on ne saurait enfin réserver exclusivement 1 appellation de physiocratesaux seuls disciples de Quesnay ; les économistes de l’école de Gournay ont exercé une influence considérable sur. la constitution de la doctrine physiocratique, qui n’est pas sortie toute formée du cerveau du médecin de M me de Pompadour, ainsi qu’on se l’imagine quelquefois. L’éminent penseur a dû profiter des recherches et des réflexions de sesamis et de ses émules ; il a modifié lui-même ses propres idées auxquelles ses disciples ont apporté successivement des amendementsas sez nombreux, chacun contribuant à 1 œuvre commune avec les tendances particulières de son esprit. Aussi les doctrines physiocratiques 1 qui sont nées, comme on le verra plusloin, peu après 1750, ne paraissent-elles pas tout à fait identiques à elles-mêmes quand on les considère dans des auteurs différents, ou à des dates différentes : soit à leur naissance,, par exemple ; soit en 1767 dans la Physiocratie, soit en 1776 au lendemain de lamort de Quesnay et â la veille de l’apparition du livre d’Adam Smith, soit plus tard dans les ouvrages des rares écrivains qui sont restés fidèles, à leurs premières opinions. Mais les diver- . Le mot physiocratique est tout à fait récent ; nous l’avons adopté un des premiers ; M. le duc de Broglie s’en est servi depuis dans les notes des Mémoires de Talleyrand.