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PÊCHE — 462 — PECHE L DES DROITS DE PÊCHE DE L’ÉTAT. — AMODIATIONS DES DROITS DE PÊCHE PAR L’ÉTAT. — RÉSULTATS DE CES AMODIATIONS. — IMPORTATIONS DU POISSON ÉTRANGER SUR LE MARCHÉ FRANÇAIS. -6. Des adjudications du droit de pêche par l’État. Le produit pour l’État de l’amodiation des droits de pêche est actuellement de •.950000 fr. environ par année pour 12 597 kilomètres, divisés en 3 397 lots, ce qui donne .un produit kilométrique de 78 fr. 50. Le résultat de ces amodiations est réelleiment dérisoire si on le compare à la valeur loeative des cours d’eau des pays étrangers. La rivière de Châteaulin (Finistère) est un •exemple frappant de l’état de décadence auquel le régime de nos eaux est arrivé. Comme presque toutes les rivières de Bretagne, elle •était autrefois si peuplée de saumons, de truites et de toutes sortes de poissons que, ■de même qu’en Ecosse et dans le pays de ■Galles, les domestiques des fermes stipulaient -dans leurs marchés qu’il ne leur serait donné ■du saumon à leurs repas que trois fois par ■semaine. A cette époque qui n’est pas lointaine (184b à 1850) la valeur du kilog. de saumon ou de huile n’excédait pas 50 à 75 centimes le kilogramme et toutes pêches ■cessaient lors des premières chaleurs du printemps, à l’exception de celles qui étaient pratiquées par les riverains pour leur con--sommation. "7. Causes de l’État d’appauvrissement de nos Eaux. Lorsque les chemins de fer ont pénétré en .Bretagne, tous les moyens de destruction ont •été mis en œuvre. Il en est de même partout -où la facilité des transports a assuré un débouché au braconnage, et c’est avec une véritable sauvagerie que les populations bretonnes se sont précipitées à la curée. L’État impuissant n’a pu qu’assister à la destruction de ces précieuses ressources. Cette rivière de Châteaulin, canalisée (canal de Nantes à Brest) ne trouve plus que des prix infimes lors de l’adjudication de ses cantonnements de pèche. Actuellement, 74 502 mètres produisent £89 francs : Mètres. Francs. i« 


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Si nous assistons au triste spectacle de cette dépréciation de la valeur loeative des eaux françaises, si nous voyons des cantonnements de pêche de plus de 5 kilomètres d’étendue s’amodier 2 francs, nous trouvons en Angleterre que la valeur loeative moyenne pour un mille (1609 mètres) des rivières où remonte le saumon est de £ 80 à £ 100 et qu’en Irlande certaines parties de la rivière Blapkwate sont louées à raisonde £ 300, £ 350, et même £ 400, c’est-à-dire 7 500 francs, 8 750 et 10 000 francs par mille. En 1885, le produit des amodiations pour toute la France donnait 949 333 francs. En cette même année les arrivages de saumon étranger à la halle de Paris sont de 605 000 kilos, dont 395 000 kilos fournis par l’Angleterre, 145000 par la Hollande, 65000 par l’Allemagne et 129 000 seulement par la France. . Importation des saumons anglais et généralement des poissons frais d’eau douce et des poissons de mer. Il résulte de ces chiffres qu’en 1885 l’Angleterre avait une telle surabondance de saumon qu’elle pouvait expédier 395 000 kilos sur le seul marché de Paris produisant net plus de deux millions de francs, qui passaient entre les mains de ses pêcheurs. De 1883 à 1889, 3 814 000 kilos de saumon étranger ont été vendus aux Halles de Paris, et pendant la même période, il n’a été vendu que 780 000 kilos de saumon français. L’Angleterre est comprise dans le chiffre pour 2303 300 kilos, c’est-à-dire a importé plus de deux fois le chiffre de la production des eaux françaises et la France a payé aux pays voisins pendant ces sept années, en ne fixant la valeur nette du saumon qu’à 5 francs le kilo, près de 20 millions de francs. Nous compléterons cette énumération des chiffres de l’importation étrangère du saumon seulement sur le marché de Paris par ceux des poissons d’eau douce frais, de 1880 à 1889. Cette importation a été de 29 550 700 kilos donnant presque une moyenne de 3 millions de kilos par année. L’importation des poissons de mer frais a été de 602 734 638 kilos produisant une moyenne de 60 273 463 kilos. Il semble inutile d’ajouter d’autres chiffres qui ne seraient pas plus probants et n’accuseraient pas plus péremptoirement Tétat d’appauvrissement de nos fleuves, de nos rivières et des eaux de nos côtes. Le mal existant à l’état aigu, le dépeuplement menaçant de devenir complet, il faut se hâter de chercher le remède. Serait- il la pisciculture ?