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PATRONAGE

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PATRONAGE

sent des connaissances et des pratiques rurales, la petite culture, déduction faite des frais de production, réalisait à surface et conditions égales le produit net le plus condérable. C’est elle encore qui, peuplant davantage les campagnes, ajoutait le plus à la force que les États doivent à la densité de la population et à l’étendue de leurs débouchés.

On trouve dans les mémoires de l’Académie, à la date de 1853, un travail de M. Passy sur les formes des gouvernements dans leurs rapports avec les divers états de la civilisation. Ce sujet, qui a été l’objet de ses constantes méditations, a été repris par lui et résumé dans un ouvrage intitulé : Des formes de gouvernement et des lois qui les régissent, qui a eu deux éditions, dont la seconde est de 1876. C’est un livre profondément médité, qui est d’un homme de science et non d’un homme de parti ; ce caractère explique peut-être pourquoi le succès d’un livre qui concluait à la supériorité du régime monarchique en France (conclusion contestable en elle-même) a eu moins de succès qu’il ne le méritait, paraissant à une époque où la France devenait républicaine. Dans ce travail, comme dans tous ceux d’Hippolyte Passy, on trouve le sens des événements historiques et la force d’un jugement serein et sûr. Au fond, Passy se montre un homme de gouvernement et, sans prendre parti toutefois pour telle ou telle forme de constitution politique il montre que l’intérêt social repose sur la sécurité des personnes et des biens et tend à établir que cette sécurité est plus assurée, suivant les traditions de l’histoire, par les gouvernements monarchiques que par les constitutions démocratiques.

Hippolyte Passy mourut à Paris, le 1 er juin 1880, à l’âge de quatre-vingt-sept ans. PATRONAGE.

SOMMAIRE

. Sens divers du mot.

. Patronage des chefs d’industrie ; son caractère. 3 • Diverses formes du patronage.

. Effets du patronage. 

. Le patronage agricole.

H. Le patronage à l’étranger.

7. Ce qui nuit au patronage.

Bibliographie.

. Sens divers du mot.

On entend d’ordinaire par patronage la protection et l’aide que donnent ceux qui ont une situation plus relevée à ceux qui sont au-dessous d’eux à raison de leur âge, de leur condition ou de leur fortune. Le sens de ce terme a naturellement varié suivant les époques et avec l’état social des divers peuples. Dans l’ancienne Rome, d’où le mot tire son origine, il désignait la protection que l’homme de la classe supérieure, le patricien, accordait au plébéien, l’homme de la caste subalterne qui avait peu de droits politiques et était obligé, même pour une action en justice, d’invoquer l’aide d’un patron. Ce patronage avait donc, malgré son nom de paternité (paternitas) quelque chose d’impérieux et de forcé» car le plébéien ne pouvait guère éviter de se réclamer d’un patron et il avait aussi une valeur toute politique. Dans nos démocraties modernes, où tous ceux qui habitent un même pays, tous ceux du moins qui y sont nés ou y résident depuis quelque temps ont des droits politiques semblables, le mot de patronage a changé de sens ; il désigne ordinairement la protection que le chef d’industrie étend sur ceux qu’il occupe. Parfois cependant il a un sens plus large : il signifie encore la protection que des personnes de toutes classes accordent à des enfants, à de pauvres gens ou à des individus placés dans une situation particulièrement difficile.

Ainsi, il a été fondé dans les centres ouvriers des maisons où les enfants, occupés, soit dans certaines industries, soit dans toutes sans distinction, sont reçus le soir ou les jours de repos. On leur offre des distractions honnêtes, on leur donne de bons conseils, des leçons même pour parfaire leur instruction. Ces institutions font plus : elles placent les enfants chez des patrons choisis, elles interviennent dans le contrat d’apprentissage (voy . ce mot) ; la loi même l’a permis ; elles en surveillent l’exécution, faisant ainsi ce que les parents ne voudraient ou ne sauraient pas faire. On appelle ces établissements des patronages. 11 y a de ces patronages qui étendent leur sollicitude aux adultes et surtout aux jeunes ouvriers et ouvrières qui ont besoin plus que d’autres d’être soutenus et protégés. Il y a encore des patronages pour les libérés des deux sexes, c’est-à-dire pour ceux qui, frappés par la justice à la suite d’un délit et désireux de bien vivre et d’effacer le passé, se voient fermer toutes les portes à raison de leur condamnation. Le patronage (c’est-à-dire les gens charitables qui le forment), les aide à trouver du travail et reste en communication avec eux, à la fois pour les soutenir et les empêcher de retomber. Ces sortes de patronages quoiqu’utiles et nécessaires même ne peuvent trouver place ici ; il ne sera question que du patronage exercé par les chefs d’industrie sur ceux qu’ils occupent et principalement sur leurs ouvriers.