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minerai de cuivre lavé et marchand, y livres (et 25 livres aux termes d’un acte postérieur) pour le plomb, et 40 shillings pour l’étain et le fer. Cette restriction d’ailleurs fut purement nominale et la couronne n’exerça jamais ce droit. Les prérogatives du prince, en ce qui concernait les mines dites royales, étaient de deux sortes : ou le droit d’entrée dans la mine en faisait partie, ou bien il n’en faisait pas partie ; dans le premier cas, la couronne pouvait autoriser les fouiRes et sondages et accorder la concession ; dans le second cas, elle ne pouvait pas autoriser la recherche des gîtes minéraux, mais si la mine était ouverte, le propriétaire avait toute latitude de l’exploiter ou de la concéder. Quelques particularités législatives, en ce qui concerne l’industrie minérale de certaines localités, méritent d’être rapportées. Ainsi, tout l’étain produit dans le duché de Cornouailles payait au souverain, comme duc de Cornouailles, une redevance de 4 livres, et l’État du Devonshire acquittait également une redevance de 4 livre 44 shillings 4 deniers par tonne. Mais ce qu’il y avait de particulier était la façon dont ces redevances, qui rapportaient alors de 45000 à 20 000 livres, étaient perçues. L’exploitant ne pouvait donner immédiatement au métal la forme demandée par le consommateur, il était obligé de le fendre d’abord en bloc, puis de l’envoyer à quelques milles de distance dans les villes à coinage où le droit était acquitté et un timbre aux armes du duché apposé sur le bloc : alors le métal revenait au lieu de production, pour de là être transporté au lieu d’embarquement. En outre, le coinage n’avait Heu que tous les trimestres, de sorte que dans l’intervalle aucune fourniture ne pouvait être faite au commerce. L’ensemble des frais de toute nature, y compris le droit, était évalué à 5 livres par tonne. On conçoit quelles entraves une pareille manière de procéder, qui dura jusque 1839, devait apporter à la bonne marche des exploitations. En France, il nous faut arriver au premier acte réglementaire des mines, portant la date du 30 mai 1445 et émanant de Charles VI, pour voir le principe de la domanialité appliqué d’une façon absolue : le roi ne se réserve alors que le dixième du produit des mines. « A nous seul et pour le tout, proclame-t-il, à cause de nos droits et majesté royaux, appartient la dîme et non à autrui ». En 1429, son fils Charles VII, attribuant à Jacques Cœur le bail général des monnaies et des mines, n’en confirme pas moins, en 4439, l’ordonnance de son père. En 1471, le droit du souverain s’exerce d’une façon plus directe, car Louis XI crée le 27 juillet une charge spéciale de «maître général, visiteur et gouverneur des mines du royaume », officier qui seul a le droit de rechercher les mines et de les faire exploiter sur les terres du domaine et mê’me sur les terres seigneuriales en payant une indemnité aux propriétaires ; ce droit plus tard put être concédé, mais la charge, tout en changeant de nom, n’en fut pas moins maintenue jusque sous le règne de Louis XV. A la suite des abus auxquels elle donna lieu, on la considéra comme un obstacle aux progrès de l’industrie extractive et on la supprima. Elle fut remplacée par une compagnie qu’on investit du privilège monstrueux d’exploiter toutes les mines de France. Il faut arriver jusqu’à 1789 pour voir entièrement disparaître la charge de surintendant des mines et supprimer toute compagnie privilégiée : à cette époque, le contrôleur général est chargé de l’administration supérieure des mines, il réunit dans ses attributions les cessions, le règlement des litiges qu’elles peuvent provoquer, les encouragements et la police des travaux. Mais jusque-là, malheureusement, les concessions faites en France par le souverain avaient témoigné de l’ignorance des principes d’une bonne et durable exploitation. Dans certains cas elles étaient trop étendues ; dans d’autres, les droits des impétrants étaient mal définis ; d’autres fois encore, les concessions étaient faites sans limites précises sur le même territoire au profit de personnes différentes, ce qui suscita des procès sans nombre qui souvent amenèrent la ruine des principaux intéressés. En outre, bien que délibérées en conseil du roi, les concessions n’étaient souvent que le prix de la faveur et de l’intrigue. Cependant, malgré ces obstacles à son développement, l’industrie minérale eût sans doute pris quelque essor, si les possesseurs de mines avaient montré dans les deux derniers siècles moins d’avidité et de mauvaise foi ; mais la plupart avaient recherché les concessions, non pour les mettre en valeur eux-mêmes, mais pour vendre ou louer le droit d’exploitation à des capitalistes étrangers aux difficultés, de l’opération, et comme, ce faisant, ils avaient soin de tromper leurs concessionnaires sur la richesse de la mine, il en résultait entre eux et ceux-ci des discussions sans fin dont l’exploitation fut loin de profiter.

Cette situation ne pouvait manquer d’attirer l’attention des économistes et de les amener à exprimer une opinion sur les diverses questions intéressant l’industrie extractive et la propriété des mines. C’est ce que fit le premier Adam Smith, qui paraît cependant