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les phénomènes de la vie économique sont continus, il s’ensuit que les faits observés demain pouvant être dissemblables de ceux observés aujourd’hui, leur classement et l’étude de leurs rapports doivent être indéfiniment ajournés.

La localisation des observations est en usage dans presque toutes les sciences. Le chimiste qui recherche comment deux corps se combinent négligera, par exemple, les variations de température qui peuvent résulter de cette combinaison ; l’astronome qui étudie un mouvement déterminé d’un astre, ne tient compte que dans certaines limites des autres mouvements de cet astre, et fixe plus particulièrement son attention sur celui qui fait l’objet spécial de son observation. Il enest de même en économie politique. Supposons qu’on veuille observer le commerce international ; il faudra classer les séries de phénomènes qu’il présente en certaines catégories. On observera les exportations et les importations de marchandises, sans aller rechercher, par exemple, les prix de revient dans les deux pays envisagés, si c’est à deux pays qu’on limite l’observation. La recherche du prix de revient des produits d’une nation est, du reste un problème du même ordre que celui de la quadrature du cercle. Quoi qu’il en soit, la comparaison de l’exportation et de l’importation limitées dans le temps ne sont qu’un des éléments du commerce international. Outre les exportations et importations de marchandises, il y a aussi des exportations et des importations de monnaies et de métaux précieux. À côté, et en même temps, le change relatif au papier de commerce offre un champ peut-être plus étendu encore d’observation ; car si ce sont les pays À et B qui ont tout d’abord été considérés, il faut ensuite, à cause des arbitrages (voy. ce mot), tourner ses regards vers les pays C, D, E, F, etc., vers toutes les nations du globe en relations commerciales avec les pays A et B. Ces observations

— qui ne sont pas nécessairement toujours des observations statistiques — ne peuvent être faites que successivement. Une fois réunies, l’analyse rationnelle fera son œuvre. Nous avons choisi cet exemple, parce qu’il n’y a peut-être pas de phénomène économique qui ait donné lieu a plus d’erreurs. De ces erreurs est sortie il y a bien longtemps la thèse de la balance du commerce (V. ce mot). Or, ces erreurs’ venaient et viennent encore auj ourd’hui de ce que Ton est porté à considérer d’un seul coup tous les éléments du problème. Nécessairement, quelques-uns de ces éléments ne tiennent pas la place à laquelle ils ont droit dans le raisonnement. Ceci connu, et tenant pour admis la néces-

— MÉTHODE 

site de la division, de la localisation, il faut, pour diviser efficacement ce travail, tenir compte des données offertes par les travaux antérieurs et diriger ses recherches suivant une idée préconçue, une hypothèse ; le résultat indiquera si l’hypothèse est vérifiée ou ne Test pas. Dans le cas qui nous occupait plus haut, celui du commerce international, l’observateur qui veut procéder scientifiquement doit connaître la théorie de l’échange ; il sait qu’on échange ainsi les produits contre des produits ou des services et réciproquement ; il arrive déjà armé d’une théorie qui le guidera dans ses investigations, théorie appuyée elle-même sur l’observation de faits permanents et vérifiés. Or, les faits observés dans le commerce international semblent parfois contradictoires ; ils ont une apparence trompeuse. La théorie sert alors à contrôler et à comparer ; et si quelque partie des phénomènes apparaît obscure par suite de la complexité inextricable des faits, la théorie qui a déjà vérifié et démontré la plus grande partie des rapports cherchés, reste encore, à l’état d’hypothèse, l’hypothèse la plus probable : à savoir, que toutes les branches du commerce, quelles qu’elles soient, obéissent aux principes de l’échange sons l’empire de la loi de l’offre et de la demande. d. Les moyens d’observations : l’observation PERSONNELLE DIRECTE ; LES ENQUÊTES ; LES STATIS-TIQUES ; les congrès ; les monographies. — De même qu’on ne saurait prétendre qu’il existe des méthodes spéciales étroitement affectées à l’étude de telle ou telle science, de même il serait téméraire d’affirmer qu’un moyen d’observation est absolument mauvais en soi ou qu’il est exclusivement préférable à tous les autres. Ces moyens sont des outils ; celui qui les manie est l’homme. Or, ces outils sont bons ou mauvais suivant qu’ils sont bien ou mal employés. Il en résulte, qu’en définitive, l’instrument d’observation premier — et l’on semble le plus souvent l’oublier — ■ au perfectionnement duquel il faut apporter le plus de soins, est l’homme. Nous n’entrerons pas ici dans des détails qui, du reste, ne seraient pas à leur place. 11 nous suffira d’indiquer sommairement les défectuosités et les avantages de ces moyens d’observation.

L’observation directe par l’homme lui-même des faits sociaux qui se manifestent autour de lui, n’est pas à la portée du premier venu. Si elle semble, au premier abord, la plus simple, elle est en réalité la plus difficile. Là le champ d’observation est très limité dans le temps et dans l’espace. Ce champ s’élargit, il est vrai, si l’observateur voyage ; néanmoins il lui faut une grande