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Actes anglais de navigation une nouvelle excitation à l’extension de son système. Les circonstances l’ont forcé à recourir à des mesures qui, par d’autres moyens, pouvaient amener le même résultat et H a mis son orgueil à créer une marine marchande. Nous laissons à d’autres le soin d’analyser et de critiquer le système de Colbert. Mais, pour l’objet que nous poursuivons, nous devons faire observer que son pian se divise en trois parties qu’il est nécessaire de distinguer avec le plus grand soin les unes des autres. D’abord la réforme administrative, ensuite la destruction des obstacles apportés aux communications intérieures, enfin le régime des règlements applicables au commerce et à l’industrie. Les deux premiers points constituaient sans aucun doute de grandes réformes qui ont produit de bons résultats, mais pour le troisième, il n’a été que pernicieux et a abouti à un échec. Le système de Colbert Ta entraîné de contradiction en contradiction. Les mesures qu’il a prises l’ont conduit à la guerre, alors que la paix était la condition essentielle du succès de ces mesures. Une mauvaise récolte l’aforcé à intervenir dans le commerce du blé, alors qu’il avait besoin de le laisser libre, et il n’a jamais pu retrouver l’occasion de lui rendre la liberté. (Clément.)

a écrasé l’agriculture par les primes qu’il 

a données à l’industrie. Les avantages de cette politique prenaient une forme qui frappait les yeux plus que ne le faisaient les inconvénients ; et cependant un millier ou deux de francs n’étaient rien pour le fabricant de Lyon, tandis que quarante cabanes tombaient en ruines dans les environs, parce que leurs occupants ne pouvaient supporter la taxe dont le produit servait à payer ce millier de francs. {Blet, du, commerce, Savary de Copenhague, V° Manufactures.) La conséquence du système de Colbert a été une série de guerres de commerce faites à l’Angleterre et à la Hollande, et ces guerres sont devenues des guerres militaires. Il en est résulté ainsi un développement de l’école protectionniste en Hollande, dont l’objet principal était le mal à faire à la France par des taxes de représailles. (Van Rees). Nous devons donc mettre à la charge du colbertisme, dès son origine, le développement d’un nouvel esprit d’animosité entre les nations et d’un esprit commercial de mauvais vouloir haineux. . Le mercantilisme et le système colonial. Nous nous référons aux articles spéciaux consacrés dans ce dictionnaire au système colonial et au système mercantile (voy. ces mots). Le premier n’est pas nécessairement lié au second. Les Espagnols ont appliqué leur système colonial avant qu’on ait pu dire que le mercantilisme existât. H y a deux méthodes d’exploitation d’un monopole colonial. La première méthode consiste à en exprimer tout ce qu’il peut donner, sauf à mettre en péril l’existence même de l’agent productif. L’autre consiste à en tirer régulièrement le maximum de produit net par une culture intelligente de sa puissance productrice. Les Espagnols paraissent avoir adopté la première méthode. La manière dont ils ont exploité leur monopole a épuisé leurs colonies. La population y a diminué avec une rapidité qui effrayait ceux qui étaient au courant des faits. (Colmeiro. )

Le système colonial de Colbert a été appliqué au Canada. C’était un système de réglementation à outrance et de minutieuse intervention. Dn combinait l’action de l’Église et celle de l’État pour détruire toutes les sources de l’énergie et de l’indépendance. (Parkman, Faillon.) Mais ce sont les Anglais qui, par le développement qu’ils ont donné au système colonial, en ont fait une branche du mercantilisme.

Le mercantilisme est anglais. Il semble que quelques-uns des principaux caractères de ce système soient dus à ce fait que la capitale de la Grande-Bretagne était une grande ville de commerce. On peut en suivre l’histoire dans une série de publications, dont la première est le pamphlet attribué à Raleigh au commencement du xvn° siècle. Mun, Fortrey, Manley, Child, Petty, Davenant, Wood et Gee sont les. principaux représentants de la doctrine jusqu’au milieu du xvin B siècle, mais on a publié aussi une masse d’autres écrits sur la matière, dans lesquels les exagérations de la folie populaire n’ont pas manqué de se produire. Le colbertisme et le mercantilisme n’étaient pas du tout identiques, quoiqu’ils eussent des côtés communs et pussent facilement se combiner l’un avec l’autre.

Les mercantilistes anglais étaient enragés contre Colbert, parce que Colbert faisait justement pour la France ce qu’ils auraient voulu qu’un grand homme d’État fît pour leur pays ; mais ils se considéraient comme victimes du colbertisme et, en conséquence, comme obligés d’y résister. La fausse théorie du commerce à cette époque est évidemment responsable de ces sentiments.

Les mercantilistes anglais traversèrent une grande crise en 1713 quand le gouvernement demanda au parlement d’approuver les clauses commerciales du traité d’Utrecht. C’était le temps où, comme disait Franklin, il y avait une « épidémie d’héroïsme ». Les inté-