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cerons d’obtenir des témoignages contradictoires. »

En 1888, parurent successivement le 2e et le 3e volume des dépositions.

Parmi celles contenues dans le deuxième volume, nous signalerons les suivantes :

M. Williamson, qui a longtemps fait des affaires avec des pays employant l’argent dans leurs transactions, estime que l’extension de l’étalon d’or a eu une influence funeste sur le commerce, en ce qu’elle a abaissé les prix et entravé les échanges. Il demande le retour au bimétallisme.

M. Robertson croit qu’il existe un rapport direct entre la quantité de numéraire et le prix des choses en général.

On ne peut, à son avis, diminuer la quantité de numéraire sans diminuer proportionnellement les prix. Le meilleur moyen de maintenir les prix serait d’émettre un papier-monnaie non convertible.

M. Cumber, banquier, pense que le renchérissement de l’or est l’avantage de l’Angleterre, pays créancier, qui reçoit en marchandises l’intérêt de ses capitaux prêtés aux nations étrangères. De même, l’Inde bénéficie de la dépréciation de l’argent. M. Cumber blâmerait toute mesure à tendance bimétalliste, de la part de l’Angleterre, mais il verrait avec plaisir la France ou les États-Unis adopter un rapport fixe entre la valeur de l’or et celle de l’argent.

M. Bertram Curie, président du comité des finances du conseil de l’Inde, n’estime pas qu’on doive modifier législativement le système monétaire anglais. La baisse des prix n’est pas causée par une disette d’or, mais par l’augmentation des instruments de crédit, chèques, bons de poste, etc. M. Curie considère que la prospérité financière de l’Angleterre est due à l’étalon d’or ; il croit que l’existence de cet étalon est la raison qui a déterminé le transfert à Londres des grands établissements financiers d’Europe.

M. Raphaël, banquier, tout en pensant que la suprématie financière et commerciale de l’Angleterre tient à la sécurité dont jouit ce pays, estime que si l’on autorisait la Monnaie d’Angleterre à monnayer l’argent, si, en outre, l’Angleterre s’entendait avec les États-Unis, la France et l’Allemagne pour une circulation de monnaie d’argent, dans laquelle le rapport de valeur serait de 15 1/2 à 1, la production de l’argent augmenterait et les prix s’élèveraient au détriment de la classe ouvrière. Actuellement, l’Angleterre, recevant en or l’intérêt des capitaux placés à l’étranger, achète de l’argent à prix réduit et paye avec ce métal les denrées alimentaires que lui envoient l’Inde, la Chine et les autres pays à circulation d’argent.

D’après M. Dunning Macleod, la baisse des prix est due à la diminution de la spéculation.

M. Wolloston Blake estime qu’on a considérablement exagéré le renchérissement de l’or. Depuis un tiers de siècle, on a produit plus d’or qu’on n’en avait produit de 1492 à 1850.

M. William Fowler nie qu’il y ait disette d’or. Jamais le numéraire n’a été à meilleur marché dans le monde. M. Fowler donne, à l’appui de ces assertions, des tableaux très intéressants. M. Fowler n’est pas bimétalliste. Un rapport qui serait établi par convention ne serait pas maintenu.

M. Hermann Schmidt, courtier, considère le bimétallisme comme le seul remède à la dépréciation de l’argent et aux variations du change.

On ne trouve pas, dans le 3e volume publié par la commission, les conclusions que l’on pouvait espérer y rencontrer. Les commissaires, à la vérité, sont d’accord pour reconnaître que plusieurs causes se sont combinées pour produire le phénomène qu’ils ont étudié ; mais, en ce qui concerne la part qui revient à ces diverses causes, leurs opinions sont tellement divergentes qu’ils les ont exprimées dans deux documents séparés et contradictoires. Par suite, il ne nous parait pas qu’il y ait lieu d’insister.

2. Les enquêtes en France.

Les enquêtes d’ordre financier ou monétaire en France ont été fort peu nombreuses et peu intéressantes avant 1860. Nous n’avons rien d’important à signaler avant une enquête parlementaire qui eut lieu en 1864, et qui est relative au taux de l’intérêt.

En 1863, M. Rouher, ministre d’État, avait annoncé au Corps législatif, pendant la discussion de l’adresse, que le gouvernement avait jugé utile de faire précéder d’une enquête la solution des diverses questions se rattachant à la revision de la législation sur le taux de l’intérêt de l’argent, questions déjà pendantes devant le conseil d’État. Peu de temps après, par un arrêté en date du 27 juin 1864, M. Rouland, ministre présidant le conseil d’État, instituait, sous la présidence de M. de Parieu, vice-président du conseil d’État, une commission chargée de procéder à une « enquête sur les modifications à introduire dans la loi du 3 septembre 1807 sur le taux de l’intérêt de l’argent ». Cette commission fut prise dans le conseil d’État.

Le président prépara un questionnaire