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tal précieux dans la caisse de la Banque. En Allemagne, le prince de Bismarck a suivi cet exemple ; la loi qu’il a fait rendre assigne aux banques un maximum d’émission ; s’il leur arrive de le dépasser, elles ont à payer une taxe de cinq pour cent sur l’excédent. Aux États-Unis, l’encaisse des banques ne doit jamais être moindre de cinq pour cent de leur émis sion. En Hollande, la Banque doit avoir toujours sous la main une quantité d’espèces ou de lingots qui est fixée par un arrêté royal en proportion avec les besoins. En Belgique, elle doit avoir toujours en numéraire le tiers au moins des billets émis ; ce minimum peut être réduit au quart avec l’autorisation du gouvernement. En Suisse, l’encaisse des banques doit être constamment égal à quarante pour cent de l’émission. En Italie, la somme des billets émis par la Banque nationale et des comptes-courants et traites payables à vue ne doit pas excéder le triple de l’encaisse ni le quintuple du capital versé. En Suède, il n’est permis aux banques Enskilda d’émettre des billets que pour une somme égale au total formé par trois éléments la partie du capital qui doit être placée en fonds publics ou en contrats hypothécaires et qui est fixée à soixante pour cent, le portefeuille et l’encaisse.

Ces différents systèmes ont chacun leur côté faible. Si la loi fixe une proportion permanente entre la quantité de billets qu’il sera permis d’émettre et la somme d’argent qui devra être tenue toujours prête pour les rembourser, cette fixation absolue peut, étant rigoureusement observée, entraîner de fâcheux soubresauts et des réductions inopportunes dans les escomptes et les prêts d’une banque, toutes les fois qu’un payement exigible ferait tomber l’encaisse au-dessous du taux légal. D’ailleurs, il ne suffit pas de fixer une proportion entre l’émission et l’encaisse il faut tenir compte des dépôts et des comptes-courants sur lesquels les banques peuvent être requises de faire des remboursements à tout instant. Or, si la loi fixe un rapport entre l’encaisse et les billets et dépôts réunis, une banque peut se trouver réduite soit à refuser des dépôts et des comptes courants, soit à restreindre ses escomptes et ses prêts, uniquement par suite du retrait d’une somme d’espèces qu’elle n’est pas en état de remplacer pour le moment. D’un autre côté, confier au gouvernement le soin de fixer la limite de l’émission, c’est le charger d’une fonction qui n’est pas de son ressort direct et particulier, au risque de compromettre sa responsabilité morale, sinon pécuniaire.

x dans la caisse de la Banque. En par la nature des choses. Les banques d’émi Avec la liberté, l’émission se trouve limitée par la nature des choses. Les banques d’émission, soit uniques, soit multiples, ne peuvent émettre trop de billets, comme il a été expliqué ci-dessus ; elles ne peuvent fonctionner qu’en remplissant certaines conditions qui s’imposent à elles sans avoir besoin d’être déterminées par la loi. D’abord, elles doivent posséder la confiance du public, et ce n’est pas la loi qui peut la leur procurer en fixant telle ou telle condition restrictive. C’est par elles-mêmes qu’elles la gagnent et la conservent, en étudiant la situation financière et monétaire du pays, en suivant avec attention tous les faits qui se rattachent à la circulation fiduciaire, de manière à avoir en toute circonstance de quoi faire face à leurs engagements. Que la loi leur impose ou non l’obligation de convertir en espèces les billets dontle remboursement leur est demandé, elles sont toujours obligées de le faire, sous peine de ne pouvoir se former une clientèle ou de la perdre, et la plus ou moins grande difficulté qu’elles éprouvent à maintenir leur encaisse au niveau nécessaire les oblige à se tenir au courant de la situation du marché monétaire et les prémunit ainsi contre les excès d’émission.

Les limites établies par des dispositions réglementaires l’ont été, non d’après des principes solidement fondés et incontestablement vrais, mais au gré de suppositions et d’idées diverses. Les opinions ont varié aussi dans les discussions qui ont eu lieu à ce sujet. Suivant les uns, l’émission doit être tenue en rapport avec l’encaisse et le capital ; suivant d’autres, c’est avec l’encaisse et le portefeuille. Les premiers ne songent pas que le capital est loin d’avoir la même importance que l’encaisse une banque qui jouit de la confiance du public et qui la justifie par une conduite prudente, peut avec un capital de 25 millions avoir une circulation de deux et trois cents millions. Le capital sert à rembourser les billets et les dépôts après que les autres moyens de remplir les engagements sont épuisés ; c’est l’encaisse qui assure les remboursements immédiats c’est donc avec elle principalement que l’émission doit être tenue en rapport.

Il faut d’ailleurs considérer de quelle façon le capital est employé, s’il est engagé dans les affaires de la banque et disponible en totalité ou en grande partie, ou s’il est placé t dans des conditions telles qu’il ne puisse être t réalisé aisément ou même ne puisse pas l’être du tout au moment du besoin, par exemple, s’il est prêté à l’Etat. Dans ces derniers cas, il n’y a pas lieu de compter sur lui pour tenir la banque en état de faire ses remboursements à toute réquisition.