Page:Say - Œuvres diverses.djvu/642

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
614
MÉLANGES DE MORALE.

cipaux traits de leur vie ou leurs paroles mémorables. Parmi les inscriptions dont les murs du temple étaient ornés, on trouvait celles-ci :

Aime pour qu’on t’aime.

Qu’un ami véritable est une douce chose[1] !

Pour les cœurs corrompus, l’amitié n’est point faite[2].

L’amitié d’un grand homme est un bienfait des dieux[3].

L’adversité est le creuset où s’éprouvent les amis[4].

Laisse voir à ton ami ton cœur jusque dans ses derniers replis, et sois sûr qu’il faut en ôter les sentiments que tu crains de lui montrer[5].

L’ami qu’il nous faut, n’est pas celui qui nous loue[6].

Il faut s’attendre à tout, hors a l’ingratitude d’un ami.

Cent autres temples s’élevaient pour célébrer d’autres vertus. Et ce n’était pas seulement dans l’intérieur des villes que les monuments parlaient au peuple ; c’était aussi dans les autres lieux fréquentes, au milieu des promenades, le long des grandes routes. La pierre, le bronze racontaient par tout des actions louables, ou bien proclamaient des préceptes utiles. Des statues, des tombeaux enseignaient au peuple ce qu’il devait imiter, ce qui devait exciter ses regrets, ce qui méritait ses hommages[7]. C’est ainsi qu’au rapport de Platon, on pouvait faire un cours de morale en parcourant l’Attique.

Les préceptes étaient toujours choisis parmi les plus utiles et les plus usuels. Nous avons vu en quoi de justes notions d’économie politique étaient favorables à la morale : eh bien ! des notions de ce genre se mêlaient à toutes les autres ; l’agriculteur, le négociant, le manufacturier, en se promenant, en voyageant, s’éclairaient sur leurs vrais intérêts ; ils rencontraient, par exemple, les maximes suivantes dont le tour simple et pourtant vif se retient aisément, et se répète de même :

  1. La Fontaine.
  2. Saint-Lambert
  3. Voltaire.
  4. Isocrate.
  5. Saint-Lambert
  6. Plutarque.
  7. Ces monuments ne font point le même effet dans le Museum, où ils ne sont visités que par des curieux ; ni dans les palais, ou le peuple ne pénètre jamais ; tandis que, lorsqu’ils se rencontrent sous les pas des promeneurs, des voyageurs, on est force de s’en occuper, on en cause : chaque jour ils réveillent des idées dans l’esprit de plusieurs milliers de personnes ; l’instruction se propage en même temps que les mœurs profitent.
    (Note de l’Auteur.)