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agrippine


Agrippine

Ne t’imagines pas que par un feint diſcours,
Ie taſche vainement à prolonger mes iours ;
Car puis qu’à l’Empereur ta trame eſt découverte,
Il a sceu mon complot & reſolu ma perte :
Auſsi i’en ſouſtiendray le coup ſans reculer,
Mais ie veux de ta mort plainement me ſouler,
Et gouſter à longs traits l’orgueilleuſe malice,
D’avoir par ma preſence augmenté ton ſuplice.

Seianus

De ma mortalité ie ſuis fort convaincu ;
Hé ! bien, ie dois mourir, parce que i’ay vécu.

Agrippine

Mais as-tu de la mort, contemplé le viſage,
Conçois tu bien l’horreur de cét affreux paſſage ;
Connois-tu le deſordre ou tombent leurs accords,
Quand l’ame ſe dépend des attaches du corps ?
L’image du tombeau qui nous tient compagnie,
Qui trouble de nos ſens la paiſible harmonie,
Et ces derniers ſanglots dont avec tant de bruit
La nature eſpouvante une ame qui s’enfuit ?