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À deux heures de l’après-midi, l’abbé Martin de Noirlieu revint au Luxembourg. Il s’entretint de nouveau avec M. de Praslin et lui administra le Sacrement de l’Extrême-Onction. Le chancelier, présent à la cérémonie, s’agenouilla dans le plus profond recueillement à la tête du lit. Eugène Cauchy, Morice et Trevel se tenaient au pied. Praslin chargea le prêtre de remettre à sa mère, après sa mort, le petit crucifix qu’il tenait dans ses mains. « Que de bien vous m’avez fait », lui dit-il. Comme il sortait de la chambre du mourant, l’abbé Martin dit au Chancelier : « M. de Praslin a un grand respect pour vous. S’il veut faire des aveux, il ne les fera qu’à vous ». Le Chancelier fait alors, assisté de Morice, une nouvelle tentative d’interrogatoire. « Vous reconnaissez-vous coupable, demandet-il, du crime qui a terminé la vie de votre femme ? — Non, monsieur, je ne me reconnais pas coupable. — Vous ne pouvez pas le nier, votre interrogatoire de l’autre jour le prouve suffisamment. Si vous n’étiez pas coupable, vous ne vous seriez pas empoisonné avec de l’arsenic. — Non, monsieur le Chancelier, je ne suis pas coupable. — Mlle Deluzy vous a-t-elle donné quelques conseils qui vous aient poussé à l’action que vous avez commise ? — Non, je n’ai jamais entendu former de pareils projets à Mlle Deluzy. — Je vous demande seulement de dire si vous êtes seul coupable du crime commis sur M°»« de Praslin. — Non, monsieur le Chancelier, je ne puis pas dire cela. Je vous ai dit que je n’étais pas coupable. » Il n’y avait pas à insister. Pour éviter le déshonneur et le scandale, Praslin était résolu, en dehors de la confession, de garder pour lui son secret. Il se considérait comme étant dans la situation du condamné qui, la sentence prononcée, n’est point tenu à l’aveu : il ne se reconnaissait pas coupable. [1] Une demi-heure après, il expira[2]. Il était quatre heures trente-cinq.

  1. C’est la doctrine de Gary et de Lehmkul, Casus conscientiœ. C’est celle de Clément Marc Instituliones morales. Rome, 1898.
  2. Notes de Morice. Intermédiaire des chercheurs et des curieux. 10 janvier 1893.