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vait point, il portait ses pas plus au Sud, vers la mer dont il aimait à surprendre l’éveil. Le climat était tiède malgré que la fin de novembre approchât ; et c’était quelque chose d’inestimable que d’échapper à l’automne dont on n’avait pas conscience dans ce pays sans feuilles. Les prairies demeuraient toujours vertes et l’hiver même ne devait pas exister.

L’Océan, seul, portait avec le ciel les traces de la saison dans une sorte de sérénité grave ; les vents n’étaient brutaux que par intermittence parce que la série des gros temps ne commence guère qu’en janvier.

Un matin, il alla, tâtonnant presque, — car le Créac’h lui-même semblait s’être endormi et n’émettait plus que de faibles lueurs, car le Stiff ne semblait plus qu’une faible veilleuse, un matin, il partit errer au long des grèves. La mer, très calme, balançait dans la baie ses ondulations rythmées et douces. Elle étalait la dentelle de ses vagues sur les galets de la plage en cirque du Runiou avec un bruit de soie froissée, comme une danseuse. Elle avait la tiédeur parfumée d’un beau corps. C’était entêtant de senteurs, entêtant et ironique d’insistance, ce remous perpétuel, comme une respiration. Une invite à se confondre en elle.