belle parmi les cinq ou six îliennes que l’initiative intéressée de quelques tenanciers mobilisait pour que l’amour serve d’adjuvant au commerce. En un mois, elle était perdue de réputation. Mais personne n’attachait d’importance à cela.
Lorsque, cinq ans plus tard, Ludovic rentra, Salomé ne voulut pas rester sous son toit. Elle émigra à Kernas, chez sa mère. ― Le marin sentit l’inutilité de toute discussion. Il prit seulement son fils et l’emmena comme mousse sur son bateau.
Salomé n’en eut pas une larme. Non point qu’elle n’aimât le petit. Mais, à mesure qu’il avait grandi, il avait ressemblé plus encore à son père abhorré. Au reste, il devait être marin, c’était logique. Et puis, eux partis, elle revint tranquillement dans sa maison.
Toujours, elle sut y vivre indépendante, ne souffrant pas un habitué. Elle était désintéressée mais dédaigneuse et ses attachements furent rares. Elle prêtait son corps sans jamais appartenir à personne. D’ailleurs, la plupart de ceux qui l’approchèrent étaient des brutes qu’elle dominait de son intelligence et de sa miraculeuse séduction : des commerçants de passage, des sous-officiers qui savaient à peine l’appré-