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La gracieuse sauvagesse ! pensait-il de cette femme qu’il n’avait jamais pu surprendre se regardant dans une glace, autrement que pour admirer l’arrangement naïf de sa triple rangée de châles aux couleurs crues, fixées par des épingles de verroterie. Une raie divisait en deux parties sa chevelure courte ; elle posait là-dessus son bonnet et sa coiffure était faite. Il fallait encore la voir, torse nu, se débarbouillant dans un seau en plein air, riant aux éclats sous la morsure de l’eau savonneuse.

Était-ce assez nature ?

Et n’est-elle point souverainement estimable, la femme capable d’apprécier l’homme sans sentimentalité, pour lui-même ? En sorte que l’être chéri ne puisse attribuer, en toute humilité, qu’à sa qualité d’homme, les faveurs qui lui sont imparties... Depuis un mois, elle n’avait manifesté son inclination que par la fidélité de son hospitalité nocturne. Si elle était peu démonstrative, c’est qu’elle ne jouait pas la comédie d’aimer. Ah ! non, pas de serments, et pas de grands mots, non plus. Un vieux dicton ne recommande-t-il pas : « Si tu aimes, n’en laisse rien paraître » ?

Parfois, pour la taquiner, il l’embrassait correctement sur les joues. Alors, elle s’irritait de