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dans un chromo. De même, nous avons peine à suivre la légende fabriquée sur Rose par des gens étrangers au pays, sans aucune connaissance des lieux.

C’est pourquoi, je me suis demandé si, en marge de la fable grossie démesurément et avec assez de maladresse, on ne saurait rétablir la vérité, plus satisfaisante, dépouillée de contradictions, et dans laquelle se retrouverait, quand même, une héroïne plus simple, plus humaine, plus admirable à nos yeux, dans son audace irraisonnée, parce qu’aucun doute encombrant ne viendrait gêner notre sympathie.

Pour atteindre à ce résultat, j’ai pensé que le meilleur était de questionner Rose et de me faire expliquer les faits dans l’ordre, en parcourant avec elle les endroits mêmes où ils se déroulèrent.

Quand j’allai la voir, Rose Héré s’apprêtait à sortir pour mener sa vache dans un pré de Nérodynn.

Elle était sur sa porte et avait surveillé ma venue, de très loin, avec cette physionomie courroucée, cet air dur et méfiant qu’on lit au froncement de ses sourcils clairs, et qu’elle a presque constamment, parce qu’elle dit qu’il y a « beaucoup de mauvais monde, partout ».