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ment, une grande frayeur saisit Virginie car elle sentit qu’il était la proie d’un mal qu’elle ne pourrait conjurer. Raidissant ses muscles, elle soutint Kergrésan jusqu’à la maison et le hissa sur son lit, presque inconscient. Un peu plus loin, Yves poussait des cris, apeurant ses frères et sœurs.

Un autre jour et une autre nuit passèrent ainsi, au milieu des transes et des plaintes. Quand l’aube parut, Kergrésan avait encore empiré. Il était pris de crampes et ses membres se fléchissaient brusquement, lui arrachant des exclamations de douleur. Il demandait à boire, sans cesse, et, dans son délire, allait jusqu’à réclamer de la glace. En deux jours, sa figure s’était considérablement amaigrie ; Virginie avait peine à reconnaître son mari : son nez s’était effilé, pincé, ses yeux, cerclés de noir, s’étaient excavés. Sa peau, sèche, semblait durcie et quand Virginie, anxieuse, lui prenait la main, elle trouvait cette main froide comme celle d’un noyé. Mais ce qui l’épouvanta surtout, ce fut la voix du malade qui était devenue semblable à celle d’un vieillard, grêle et faible, cassée.

Alors, il lui annonça qu’il allait mourir.

Virginie n’avait jamais pensé à la mort. Et