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XIII

GENTIL COQUELICOT, GENTIL COQUELIQUIT



Lété, arrivé à grandes enjambées, avait fait les jours plus longs, le soleil plus chaud, le jardin tout en fleurs et la charmille touffue.

Les prés verts, aux herbes longues et fleuries, s’étendaient immenses et onduleux sous le vent parfumé venant des bois.

Les bêtes ne les traversaient plus, de crainte qu’elles mangeassent trop vert et trop tendre. On les conduisait maintenant très loin de la Voirette, du côté aride des marais gâts où la pousse drue, rare et salée, donne aux vaches le bon lait jaune, crémeux et abondant.

Liette, et Botte un tricot à la main, le matin et souvent le soir, les suivaient de loin par les routes ombragées, bordées de buissons d’aubépine. Elles s’éloignaient des Gerbies, traversaient la grande route, et dépassant le village, disparaissaient dans le bois des Mottes sur la lisière duquel habitaient les parents de la bonne.

Pendant que le soleil ardent calcinait la campagne, on s’installait sous la feuillée au milieu d’un bouquet d’arbres d’où jaillissait une petite source qui, frétillante, laissait couler un filet d’eau, mince comme une langue de cristal, sur les cailloux blancs du chemin.

Botte, assise dans l’herbe fraîche et verte, chantait sa gentille ronde, et Liette en répétait le refrain :


          Là-haut, là-haut sont des souris (bis),
          Qui vont au bal toute la nuit,