Page:Savary - La Tour de la lanterne (= Les Malheurs de Liette) 2e édition - 1913.pdf/93

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
94
LA TOUR DE LA LANTERNE.

Les charmes d’une côte sablonneuse, où l’on entrait à mi-jambes, et en plein soleil, n’étaient pas à dédaigner…

Liette en revint passablement fatiguée, car la surveillance peu farouche de la cousine Élodie lui laissa toute liberté pour courir à son aise d’un monticule à l’autre, mais aussi charmée d’avoir pu emplir ses poches, jusqu’à les défoncer, d’un sable fin, brillant, inconnu aux Gerbies et qu’elle comptait bien mettre dans la sébile de l’encrier de grand-papa.

Lorsqu’il fallut se séparer les uns des autres le soir d’une journée aussi accidentée, chacun trouva que le temps avait passé trop vite.

Et c’est alors que Liette comprit que l’insistance de tante Minette pour les faire revenir ce jour même n’avait point été vaine, car l’oncle Rigobert dut batailler longtemps contre les sollicitations pressantes des deux vieilles dames.

Liette revint aux Gerbies dans un demi-sommeil, sans se rendre compte de son arrivée. Et comme nos songes sont souvent le réflet de nos vives impressions, toute la nuit elle rêva qu’emportée par un vent terrible, habillée comme un des archanges de l’église et coiffée d’une couronne de marguerites des prés que le vieux gardien lui avait posée sur la tête, elle planait dans les airs au-dessus du clocher de Marennes et répandait sur la terre, à pleines mains, un sable fin, argenté, pour endormir les petits enfants.