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LA TOUR DE LA LANTERNE.

Toutefois, si la fête ne devait pas être animée, la réunion de famille ne fut pas contremandée.

Dès le 18 novembre, les Gerbies se remplirent de tous les enfants, petit-enfants et arrière-petits-enfants de grand-papa qui purent venir. Le colonel Rigobert promit d’arriver la veille de la fête, avant le prochain départ de son régiment pour l’armée de la Loire.

M. Joseph Baude, alors en captivité en Allemagne, y était représenté par sa femme et ses deux plus jeunes fils ; et les deux fillettes de Philippe Minhet, qui se battait à Paris, occupaient près de leur grand’mère le petit lit blanc dans lequel couchait autrefois Liette.

Enfin Mme Baude, sa fille, Mme Verlet et son gendre de retour à Rochefort, ainsi que leur deux enfants, arrivèrent un soir.

Personne, ni aux Gerbies, ni à La Rochelle, n’avait voulu prévenir la grand’mère de Liette du prétendu retour de la jeune fille et de ses infructueux efforts pour se faire reconnaître, dans la pensée de lui épargner une émotion funeste et peut-être inutile.

Mme Baude, que nous avons connue bonne et tendre grand’mère, n’a point changé. Elle n’a certainement pas oublié sa chère disparue, bien que les caresses de ses deux autres petits-enfants fussent venues peu à peu remplir le vide creusé en son cœur par l’absence cruelle de sa Liette.

M. et Mme Verlet avaient peu vécu avec leur fillette ; et malgré leur profonde douleur, le temps, l’éloignement, puis surtout les naissances successives de Lilette et de Paul leur avaient facilité la résignation.

Mme Minhet y pensait souvent ; mais dans la crainte d’attrister les réunions familiales, elle évitait d’y faire allusion.

Cependant, ce nom de Liette, charmant comme le sourire d’un radieux malin, était resté très vivace dans le cœur de quelqu’un qui en parlait encore les larmes aux yeux, avec l’insistance de revenir toujours aux regrets que donne la disparition d’un trésor précieux.

C’était M. Leypeumal, c’était le bon parrain. Il avait aimé