VI
RÉVÉLATIONS
n soir d’octobre de l’année 1870, Liette rentra au cottage beaucoup plus tard qu’elle n’en avait l’habitude. Lottie depuis longtemps pleurait en la demandant. Mrs Moore, visiblement
inquiète, s’était mise plusieurs fois, grondeuse, sur le seuil de la
porte, se demandant qui avait pu mettre ainsi la jeune fille en
retard.
Partie depuis le matin pour la ville, Liette ne restait jamais aussi longtemps absente ; aussi, la mauvaise humeur de la vieille femme augmentait-elle à mesure que le jour baissait.
Liette entra enfin, mais mouillée de la tête aux pieds, la figure bouleversée, les cheveux en désordre, le regard étrange.
« Pouvez-vous bien venir aussi tard ? dit Mrs Moore d’une voix irritée. Que vous est-il arrivé ? Ici tout est à faire ; Lottie n’a pas été soignée, et Harris vient de partir passablement inquiet.
— Je le regrette, répondit Liette, mais tranquillisez-vous, rien de fâcheux ne m’est survenu… au contraire.
— Eh bien ! alors ?
— Non, rien qui puisse donner de l’inquiétude. J’ai eu l’occasion, en revenant de la ville, de retirer heureusement de l’eau le pauvre petit enfant des Morrisson qui allait se noyer.
— Vraiment ! »