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DEUXIÈME PARTIE


I

EN ROUTE VERS L’INCONNU



Ou était Liette ?

Qu’était-elle devenue, pendant que toute une ville la pleurait, et qu’une grand’mère, aussi tendre que la sienne, se mourait de douleur ?

Liette fuyait vers une contrée inconnue où sa malheureuse destinée l’envoyait vivre désormais.

Voici ce qui était arrivé.

Profitant de l’inattention de sa bonne, Liette s’était avancée vers les bords du bassin, obsédée par une pensée qui venait de surgir dans son cerveau : le soudain et ardent désir de sauter sur un de ces bateaux que les flots de la marée montante faisaient danser sur leurs amarres.

Les ponts de planches, jetés de la terre aux barques par les marins, tentaient beaucoup ses petits pieds agiles. Elle regardait ces yoles, ces chaloupes, ces lougres, ces sloops, ces goélettes, ces navires de toutes sortes, avec l’envie irrésistible d’aller les visiter, pendant qu’elle était ainsi livrée à elle-même.

Par trois fois déjà elle s’était retournée pour voir si Zélia la suivait des yeux. Et saisissant l’instant où cette surveillance lui