Page:Sauvageot - Laissez-moi (Commentaire), 2004.djvu/77

Cette page n’a pas encore été corrigée

dans la nuit froide. Quand vous rencontrez un enterrement à Paris, vous vous découvrez ; ici on se cache ; on détournerait presque la tête en passant près du cimetière. Demain peut-être, pendant que nous essayerons de rire et de danser, percevrons-nous de loin le bruit que fait un mourant que l’on pleure. Celui-là meurt de ma maladie ; un jour comme un autre, pourquoi échapperais-je à ce sort ? Resserrés dans ce coin du monde, nous pouvons nous dire : « À qui le tour ? » On sent ici, dans l’inanité des jours où chacun lutte comme à l’agonie pour échapper à l’angoisse, toute la misère humaine qui crie : « Pourquoi ? Pourquoi ? »

Si j’arrivais à vous faire sentir cette misère, vous vous hâteriez de l’oublier ; et pour vous rassurer, vous diriez ce que tout homme bien portant dit des lieux où l’on souffre : ce n’est pas si terrible qu’on le dit. Je ne vous dirai rien. Mais laissez-moi : vous ne pouvez plus être avec moi. Laissez-moi souffrir, laissez-moi guérir, laissez-moi seule. Ne croyez pas que m’offrir l’amitié pour remplacer l’amour puisse m’être un baume ; c’en sera peut-être