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femme qu’on ne voit jamais : toute la nuit, inlassablement, sans arrêt, cette toux craque comme du bois sec ; pendant combien de jours encore l’entendra-t-on avant qu’elle ne s’éteigne ? Le corps n’est pas assez épuisé pour que ce soit cette nuit que la lueur du petit jour l’emporte. De la chambre de ce garçon, qui tout à l’heure nous a quittés très vite en cachant le sang qui filtrait de ses lèvres, vient une toux profonde et humide : chaque hoquet amène du sang… Quand aura-t-on le soulagement de savoir que ce sang ne coule plus ? Ma voisine fait entendre sa petite toux rassurante : je ne suis pas seule à veiller. Et, moi-même, je tousse en réponse pour vérifier l’état de mes poumons. Vais-je sentir ce creux, ce vide de soufflet crevé ? Ou bien ce petit déchirement qui fait croire qu’un lambeau s’est détaché ? Ou bien cette résonance pleine qui donne l’illusion que tout est raccommodé ? Que de toux dans la nuit ! Est-ce un hymne ? Où va-t-il ?

Je suis seule, mais pas plus seule aujourd’hui ; moins peut-être. Ce soir, je sais que tout est cassé, et c’est presque un soulagement.