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mais je ne voudrais pas que tu changes. Je t’en parle quelquefois en souriant. Je ne voudrais pas te froisser, ni te donner des conseils. Je voudrais que tu saches ce que je sais ; et j’aimerais qu’au lieu d’essayer de ne pas te montrer tel que tu es, tu me dévoiles toutes tes petites laideurs. Je les aimerais, car elles seraient bien à moi. Les autres ne les connaîtraient pas, et c’est par là que nous nous rejoindrions en dehors du monde. Rien n’est plus attachant que les faiblesses et les défauts : c’est par eux que l’on pénètre l’âme de l’être aimé, âme constamment cachée par le désir de paraître semblable à tout le monde. Il en est comme d’un visage. Les autres ne voient qu’un visage ; mais soi, l’on sait à quel instant précis la courbe du nez, au lieu de continuer sa ligne idéale, se casse imperceptiblement pour dessiner un nez ordinaire ; on sait que, de près, le grain de la peau est gros avec des points noirs ; on a trouvé la tache des yeux qui par moments éteint le regard, et le millimètre qu’a, en trop, la lèvre pour être distinguée. Ces petites irrégularités, on a envie de les embrasser plus que les