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tandis que la terre tourne

À midi, c’est une rumeur sourde et sûrette,
L’antenne et le pistil se croisent et se guettent,
Les gorges de parfum ont un souffle attiédi ;
Les hannetons lourdauds au désir engourdi
Y laissent choir leur vol qui titube et qui grince,
La libellule joue avec la guêpe mince
Et les papillons mous dans leur désordre ailé
Frôlent négligemment le festin corollé,
À peine plus vivants que les fleurs dans la brise.
L’écorce a le luisant d’une brune cerise
Et monte serpentine entre les floraisons.
Un rameau s’inclinant, pâmé dans sa toison,
Touche l’herbe et surprend le secret de la terre ;
Les rayons au travers passent leur flamme claire
Comme ceux que l’on voit percer la nue au ciel.
Ô bouquet de candeur, léger gâteau de miel !
L’abeille court, s’affole aux houpettes sucrées,
Trousse le jupon court des danseuses poudrées,
Vibre et semble un battant au cœur d’un clocheton,
Muse comme un amant sur un petit téton,
Puis vole chantonnante à sa ruche de paille.
Toute l’ardeur du jour ici glane et travaille ;