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l’âme en bourgeon


Laissez ; n’ayez pas peur de mes flèches d’argent,
Des capricornes noirs et des abeilles folles,
Lorsque vous vous plaisez aux flots du lac changeant
Et que les taons velus sont douillets aux corolles.

C’est depuis ce jour-là que je te porte en moi,
Dieu frêle, et ma pensée observe ton image,
Les ongles sont si mous aux pointes de tes doigts
Que je me flatte encor que tu n’es pas volage.

Ah ! que te voilà doux, candide et somnolent,
Tu dors comme un oiseau couvé par ma tendresse,
Jamais, quand tu dansais dans le jour ruisselant,
Tu ne m’as enchantée avec tant de jeunesse.

Je chasse de ton front les abeilles, j ai mis
Des baisers cotonneux sur l’épine des flèches
Et quand tu surviendras, après avoir dormi,
Mes rires ondoiront dans tes paupières fraîches.