Page:Sauvage - Tandis que la terre tourne, 1910.djvu/118

Cette page a été validée par deux contributeurs.
118
tandis que la terre tourne

Me prête sur l’azur son geste aérien.
Mon flanc s’appesantit de germes sur le tien.
Oh ! laisse que tes fleurs s’élevant des ravines
Attachent à mon sein leurs lèvres enfantines
Pour prendre part au lait de mes fils nourrissons ;
Laisse qu’en regardant la prune des buissons
Je sente qu’elle est bleue entre les feuilles blondes
D’avoir sucé la vie à ma veine profonde.
Personne ne saura comme un fils né de moi
M’aura donné le sens de la terre et des bois,
Comment ce fruit de chair qui s’enfle de ma sève
Met en moi la lueur d’une aube qui se lève
Avec tous ses émois de rosée et d’oiseaux,
Avec l’étonnement des bourgeons, les réseaux
Qui percent sur la feuille ainsi qu’un doux squelette,
La corolle qui lisse au jour sa collerette,
Et la gousse laineuse où le grain ramassé
Ressemble à l’embryon dans la nuit caressé.
Enfant, abeille humaine au creux de l’alvéole,
Papillon au maillot de chrysalide molle,
Astre neuf incrusté sur un mortel azur !
Je suis comme le Dieu au geste bref et dur