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tandis que la terre tourne

Que disent le tilleul qui penche sur ton toit,
Le croissant qui te pique un instant de sa corne,
La terre dont ta base obscure sent le froid ?

C’est le même infini qui dort au creux des roses,
Sous les crânes osseux et dans l’immensité ;
Je ne lirai pas mieux sur la face des choses
Que dans le livre d’or d’une étoile d’été.
L’abeille qui chuchote au-dessus des calices
En sait autant que moi sur le mystère épars ;
Son âme ne prend pas aux fleurs plus de délices
Que mon œil de rayons dans les autres regards.
Mon désespoir n’a pas une plainte plus grande
Que celle d’un grillon qui grince dans le foin
Ou que celle qu’exhale en tombant une amande.
J’ai beau monter toujours, je n’irai pas plus loin
Qu’une fourmi tournant au désert d’une orange.
Je vais sans un ami dans la nuit de la nuit,
Mangeant de cet azur que toute étoile mange,
Passant avec mon cri qui se perd dans le bruit.