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le mois de mars

dans l’ombre et armé d’un plein seau d’eau. De temps en temps, comme une provocation, le cri de « I naë, i naë » (elle se noie, elle se noie) s’échappait des lèvres de ce champion invisible, et, chaque fois que le défi était relevé, il y avait beau jeu. L’assaillant, presque toujours, avait affaire à forte partie : tant pis pour lui si, après avoir été arrosé des pieds à la tète, sans avoir mené son entreprise à bonne fin, il revenait à la charge ! car, alors, il lui fallait engager une lutte corps à corps avec son adversaire, et celui-ci ne manquait guère de lui faire prendre un bain complet dans l’auge de la fontaine.

Quand les lourres (veillées) sont closes, — les lourres où l’on raconte encore de si merveilleuses histoires, où l’on chante aussi de si belles chansons, — le temps des couaraiges est venu. On donne le nom de couaraiges à des visites prolongées qui sont dans le jour, entre le dîner et le souper, ce que sont, à peu de chose près, les veillées après le repas du soir[1]. Dans les coua-

  1. Les couaraiges et les lourres peuvent exister simultanément pendant l’hiver, mais les réunions du jour n’acquièrent d’importance et ne présentent de véritable attrait qu’au retour de la belle saison.