SUR UN POINT DE LA PHONÉTIQUE DES CONSONNES EN INDO-EUROPÉEN. 429
hérité de l’âge primitif, il faut reconnaître que ce parallélisme n’est pas un argument à exploiter, vu que le sanscrit se serait chargé de niveler les deux formes même au cas où il les aurait reçues dissemblables[1].
La lumière que le sanscrit est incapable de faire en ce qui le concerne pourrait être espérée de son proche parent, l’iranien, où -tt- s’annonce par le groupe spécial -st- et où par conséquent l’absence de sifflante fournirait une indication formelle. Autant l’indien satram est ambigu, autant le zend «haθrem» (si telle était la forme correspondante) serait la démonstration victorieuse de tout ce que nous cherchons à établir[2]. Par une chance malheureuse aucun des mots décisifs satram, âatrani, éhatram ne figure dans un monument iranien. Il reste χšaθrem = kṣatram, que nous persistons à croire formé de kṣad + tram, principalement parce qu’il y a impossibilité phonétique à le dériver de kṣā- et impossibilité logique à le faire venir de kṣan-. Cet unique exemple, s’il est admis, constitue une preuve irréfragable.
Autant que possible on s’est astreint jusqu’ici à ne citer que des exemples présentant une voyelle brève devant le groupe t(t)r. C’est que la quantité de la voyelle n’est pas indifférente pour le groupe consonantique qui suit. Il convenait de séparer les deux questions; mais les conclusions finales sont les mêmes:
Le t double (devant r-w) se confondra avec t simple, après voyelle longue aussi bien qu’après voyelle brève, quoique par une voie plus détournée.
Le premier point à fixer est de savoir ce que devient t simple placé entre voyelle longue et r-w. A l’inverse de ce qui arrive
- ↑ Les dictionnaires donnent sattram, avec une autre orthographe que piṭrā: distinction vaine, comme toute distinction entre -tr- et -ttr- sanskrit. Dans le Véda par exemple, satram, datram, patram ne reçoivent jamais qu’un seul t comme piṭrā. Si nous nous abstenons d’en tirer un avantage facile, c’est justement que nous n’attachons pas d’importance aux variations indiennes entre -tr- et -ttr-. Autrement quoi de plus simple, encore une fois, que de dire: «satram prouve *setrom», ce qui clorait la discussion de façon péremptoire?
- ↑ Remarquons en revanche que «hastrem» ne ruinerait pas irrémissiblement notre système, une telle forme pouvant toujours s’expliquer par l’analogie, aussi bien que -πλαστρον en grec. C’est pouniuoi il n’y a pas d’objection absolue à tirer par exemple de hamōistra «opposition». D’ailleurs cette forme, d’après M. James Dannesteter, qui a bien voulu me la signaler, vient probablement de la racine qui est en sanskrit mith-, plus exactement mithi- (racine dissyllabique). Sur qāstra- faussement rapporté par Justi à qād-, voir J. Darmesteter, Études iraniennes, II, 189 seq.