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après la séparation se trouvent par hasard identiques dans les deux idiomes). Ce qui est en tout cas exclu, c’est la communication de ces caractères par contagion. D’une manière générale, une langue qui a évolué dans la discontinuité géographique présente vis-à-vis des langues parentes un ensemble de traits qui n’appartiennent qu’à elle, et quand à son tour cette langue s’est fractionnée, les divers dialectes qui en sont sortis attestent par des traits communs la parenté plus étroite qui les relie entre eux à l’exclusion des dialectes de l’autre territoire. Ils forment réellement une branche distincte détachée du tronc.

Tout autres sont les rapports entre langues sur territoire continu ; les traits communs qu’elles présentent ne sont pas forcément plus anciens que ceux qui les diversifient ; en effet, à tout moment une innovation partie d’un point quelconque a pu se généraliser et embrasser même la totalité du territoire. En outre, puisque les aires d’innovation varient d’étendue d’un cas à l’autre, deux idiomes voisins peuvent avoir une particularité commune sans former un groupe à part dans l’ensemble, et chacun d’eux peut être relié aux idiomes contigus par d’autres caractères, comme le montrent les langues indo-européennes.