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tout fraischement defroquez, et ces prestres debauchez, y ont devotement tourné les feuillets de leur breviaire, et gaigné planieres indulgences ! Bref, ceste est la seule cause du prompt et zelé decret de Messieurs de nostre mere Sorbonne, aprés boire, qui a faict enfin eclater force coups du Ciel : et, par nostre bonne diligence, nous avons faict que ce Royaume, qui n’estoit qu’un voluptueux jardin de tout plaisir et abondance, est devenu un grand et ample cymetiere universel, plein de force belles croix peintes, bieres, potences, et gibets.

Arrivé donc que je fu en ceste ville, aprés avoir envoyé guarir la ville d’Orleans de trop d’aise[1] et interdire le commerce de Loire qui entretenoit leurs delices, j’en voulu autant faire icy, et bien m’en prit. En quoy, madame ma mere, ma sœur, ma femme, et la cousine d’Aumale, qui sont icy pour m’en dementir, m’assisterent fort catholiquement. Car elles et moy n’eusmes autre plus grand soin et sollicitude qu’à faire fond pour la guerre, et, en ce faisant, soulager et descharger tous les devots habitants, bons

  1. Après le meurtre du duc de Guise, le duc de Mayenne fit révolter la ville d’Orléans contre son gouverneur, et cette ville, qui jouissait jusque là d’une grande prospérité, éprouva de nombreuses calamités depuis qu’elle eut embrassé le parti de la Ligue.