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fut l’echantillon de la grande piece de la justice des Estatz futurs.

Or, pendant qu’on faisoit les preparatifs et eschaffaulx au Louvre, ancien temple et habitacle des Roys de France, et qu’on attendoit les deputez de toutes parts, qui, de mois en mois, se rendoient à petit bruit, sans pompe ny parade de suitte, comme on faisoit anciennement quand l’orgueil et la corruption de nos peres avoient introduit le luxe et la superfluité vitieuse ; il y avoit en la court dudit Louvre, deux Charlatans, l’un Espagnol[1] et l’autre Lorrain[2], qu’il faisoit merveilleusement bon veoir vanter leurs drogues et jouer de passe-passe tout le long du jour, devant tous ceux qui vouloient les aller veoir sans rien payer.

Le Charlatan Espagnol estoit fort plaisant, et monté sur un petit eschaffaulx, jouant des regales[3] et tenant banque[4], comme on en veoit assez à Venise, en la place Sainct-Marc. A son eschaffaulx estoit attachée une grande peau de parchemin escrite en plusieurs langues, scellée de cinq ou six seaux

  1. Le cardinal de Plaisance.
  2. Le cardinal de Pelvé, archevêque de Reims.
  3. Instrument à touches comme l’orgue.
  4. Tenant banque. On dirait aujourd’hui : faisant la parade, le boniment.