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si leurs lucubrations le meritent. Quant à moy, je conseilleray toujours à mon cousin de s’amuser à autre chose qu’à leur respondre ; mais j’en connoy plus d’une douzaine en nostre ville à qui la peau et la plume demangent, et n’attendent qu’un compulsoire[1] pour faire extraits et vidimus[2] de leurs Menippées, beaucoup plus sanglantes que la premiere. Si en apprenez quelque chose, mon bon amy, je vous prie me le faire sçavoir. Vous voyez comme, pour vous contenter, j’ay extravagué un peu hors de nostre propos, et me suis quasy laissé emporter à l’indignation que j’ay contre ces gens qui bastissent encore sur les fondements de la premiere rebellion, et qui nous menacent de jouer des espées blanches, au lieu qu’ils n’ont joué que des espées rebatues. Et peu s’en a fallu que je n’aye destourné ma colere sur les Jesuistes : mais, à ce que j’entends, ils ne la feront plus gueres longue en ce pays[3], et par ce moyen on ne trouvera plus grand goust aux Espagnols ; car, à ce que disoit un deputé de Bourgongne : Un Espagnol sans un Jesuiste est une perdrix sans orange.

Mais pour retourner d’où nous sommes partis, je vous prie, si réimprimez la Menippée, d’y effacer les noms de ceux qui se sont renduz bons serviteurs du Roy, et qui y continuent avec resolution ; mais il y en a qui branslent encore au manche, et ont besoin d’un an d’approbation

  1. Lettres de contrainte, provocation.
  2. Revision.
  3. Les Jésuites furent bannis par arrêt du Parlement, après que Jean Châtel, qui avait été élevé chez eux, eut tenté d’assassiner Henri IV, en 1594.