Page:Satyre menippee garnier freres 1882.djvu/385

Cette page n’a pas encore été corrigée

ceue contre le feu Roy), se sont d’eux-mesmes soubmis à reconnoistre le Roy present, si tost qu’ils l’ont veu Catholique, et ont remis en sa puissance les places qu’ils tenoient, sans marchander ny entrer en composition avec leur Maistre. Et ceux-là sont plus excusables de leur premiere erreur que les autres, voire meritent recommandation et louange, et d’estre mis aux Chroniques pour avoir delivré leur pays de la tyrannie espagnole, comme on y veoit ceux qui delivrerent la France des Anglois : dont sont venuz tant de beaux privileges octroyez aux Familles, aux Villes et Communautez, qui d’elles mesmes secouerent le joug estranger pour se soub-mettre à la douce puissance de leurs Roys naturels. Mais ce qui fasche le plus tous les gens de bien est de veoir ceux qui ne l’ont faict que par force et necessité estre neantmoins caressez, receuz et bien veneuz, et se glorifier qu’ils sont cause que le Roy est converty. Ceux-là me font soubvenir d’une response que fit le grand Fabius à un capitaine Romain, gouverneur de Tarente, qui, aprés avoir laissé perdre la ville par la trahison des citoyens, se vantoit d’avoir esté cause qu’elle fut reprise par Fabius : A la verité, dit Fabius, je ne l’eusse point reprise ny recouvrée si tu ne l’eusses perdue. Aussy se peuvent ces gens icy vanter qu’ils sont cause de tant de trophées et de triomphes que le Roy a acquis en reconquerant son royaume ; car, sans leur trahison et rebellion, il n’eust pas tant gaigné d’honneur à les subjuguer et ranger à raison[1]. J’en veoy d’autres qui n’ont bougé de leurs mai-

  1. Variante de l’édition de 1599 : " Car sans trahison et re-