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cousin n’en veut ny n’en espere honneur ou louange. Alors je luy demanday s’il n’y avoit point moyen que je pusse veoir ledict seigneur Agnoste. Et il me fit response que non pas pour lors, parce que son cousin se renfermoit quelquefois pour nuict jours sans veoir personne ; mais, si je vouloy sçavoir quelque chose de son intention, il pensoit me pouvoir satisfaire tout autant que son cousin mesme, à cause qu’ils avoient souvent devisé ensemble sur le mesme sujet, et sur ce qu’on luy venoit rapporter tous les jours des propos qu’on tenoit au Palais et par la ville touchant son livre. — Je prendray donc la hardiesse, luy dy-je, puisque je ne puis avoir cet heur de le veoir, de vous demander quelques doutes, où je veoy beaucoup de personnes s’ahurter et ne s’en pouvoir pas bien resoudre. Premierement, il a affecté ce tiltre nouveau de Satyre Ménippée que tout le monde n’entend pas, veu qu’aux copies à la main y avoit l’Abregé et l’Ame des Estats. — Ceste question, dit-il, ne peut tomber qu’aux esprits ignorants : car tous ceux qui sont nourris aux lettres sçavent bien que le mot de satyre ne signifie pas seulement un poëme de mesdisance pour reprendre les vices publics ou particuliers de quelqu’un, comme celles de Lucilius, Horace, Juvenal et Perse, mais aussy toute sorte d’escrits remplis de diverses choses et de divers arguments, meslez de proses et de vers entrelardez, comme entremets de langues de bœuf salées. Varron dit qu’on appelloit ainsy anciennement une façon de pastisserie ou de farce où l’on mettoit plusieurs sortes d’herbages et de viandes. Mais j’estime que le nom vient des Grecs, qui introduisoient sur les eschafauts, aux festes publiques,