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les affaires et du naturel de toutes les personnes plus signalées de France. Tellement qu’il faut par necessité que ce soit un François qui l’a faict, bien entendu et rompu à la Cour, et que le Florentin qui l’emportoit en son pays, auquel son valet le desroba avec la valize, l’eust tourné de françois en italien pour le faire veoir en Italie. C’est pourquoy je me suis travaillé avec un soin merveilleux pour descouvrir celuy à qui nous estions redevables de cest ouvrage, qui a donné tant de plaisir et de contentement à tous les gens de bien. Mais, quelque perquisition que j’en aye peu faire, je n’ay trouvé personne qui m’en ait dict de bien certaines et asseurées nouvelles, ne parlants que par indices, soub-çons et conjectures ; jusques à ce qu’un de ces jours, comme j’estois presque desesperé d’en rien sçavoir, se vint, de fortune, adressera moy par la rue un grand vieil homme fort maigre et pasle, que j’ai depuis ouy nommer maistre Paul Ypragmon[1], qui me demanda d’abordée si c’estoit pas moy qui avoit imprimé le Catholicon. Je lis difficulté, du commencement, de le luy confesser, craignant que ce fust quelqu’un qui y fust nommé dedans, et s’en sentist offensé, comme aucuns ont laict. — Non, non, dit-il, ne me celez point ce que tout le monde sçait. J’estois à Tours quand vous l’imprimastes premierement, et sçay bien le nom de ceux qui vous en donnerent la copie originale, mais peut-estre que ny vous, ny ceux qui vous l’ont donnée, ne sçavez pas qui en est l’autheur. Alors, voyant qu’il en sçavoit tant, je ne peus luy nier qu’à la vérité je l’avois imprimé à Tours, mais que je ne

  1. Eupragmon, serviable, bienveillant.