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il permis de croire que tous ces Marranes[1], qui font tant de signes de croix, et se frappent la poitrine avec tant d’esclat à la messe, sont neantmoins Juifs et Mahumetants, quelque bonne mine qu’ils fassent ? Pourquoy ne diray-je que Monsieur de Lion est Lutherien, comme il a esté autrefois, encore qu’il fasse sa prunelle toute blanche en la tournant aux voultes de l’Eglise, quand il adore, ou feint d’adorer le Crucifix[2] ?

Mais ce n’est pas d’à ceste heure qu’on parle ainsy des Roys, et y a un vieil proverbe qui dict que Jupiter mesme quand il pleut, ne plaist pas à tous les mortels : les uns veulent de la pluye pour leurs choux, et les autres la craignent pour leurs moissons. Or, ce que j’ay differé à dire, qui me semble lui manquer, et ce dequoy vous et moy luy sommes plus tenuz, c’est qu’il nous traitte trop doucement et nous choye trop. La clemence, en laquelle il est superlatif et excessif, est une vertu fort louable et qui porte en fin de grands fruicts et de longue du-

  1. rme injurieux. C’est par ce nom que les Espagnols désignaient les Maures établis en Espagne ; par extension cette appellation s’est appliquée à tout chrétien d’une orthodoxie douteuse.
  2. dition : a Et il sçait bien ce qu’on luy a dit n’aguères quand il a proposé de l’aire faire les Pasques à cette belle assemblée, su b utraque specie. "