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des femmes. Je m’assure que la plus-part de la Compagnie, et principalement Monsieur le Lieutenant, ne lui sçauroit faire ce reproche sans rougir[1]. Car, à la verité, ce n’est pas imperfection qui puisse empescher les actes de vertu ; mais, au contraire, jamais brave guerrier ne fut qui n’aymast les dames, et qui n’aymast acquerir de l’honneur pour se faire aymer d’elles. C’est pourquoy Platon souhaitoit avoir une armée toute composée de gens amoureux, qui seroient invincibles et feroient mille beaux exploicts d’armes pour plaire à leurs maistresses. Aussy les poetes, bons naturalistes et grands maistres en la science des mœurs, ont toujours faict le dieu Mars amy de Venus. Qu’on considere tous les grands capitaines et monarques du monde, il ne s’en trouvera guere de sobres en ce mestier : l’Empereur Titus, qui est proposé pour le plus vertueux, le plus sage et le plus doux Prince qui ait jamais porté sceptre, n’aimoit-il pas esperdument la Royne Berenice, sans que jamais toutesfois ses amours luy fissent prejudice, ou apportassent retardement à ses affaires ? Il faut conceder aux Princes quelques relasches et recreation d’esprit, aprés qu’ils ont tra-

  1. Addit. « Comme un jour monsieur le cardinal de Pelvé luy sceut bien dire ».