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qui ne sçauroit long-temps demourer en paix sans attaquer ses voisins : dequoy les Flaments ont faict un proverbe qui dict que, quand le François dort, le Diable le berse. D’ailleurs, il voit ses Estats separez, et quasy tous usurpez par violence, contre le gré des habitants qui luy sont mal affectionnez ; il se voit vieil et caduc, et son fils aisné peu vigoureux et mal sain, et le reste de sa famille estre en deux filles, l’une desquelles il a mariée avec le prince le plus ambitieux et necessiteux de l’Europe[1] ; l’autre, qui cherche party[2] et ne peut faillir d’en trouver un grand. Si, aprés sa mort, qui ne peut plus guère tarder selon le cours de nature, ses Estats se partagent, et que l’un de ses gendres attaque son fils, il sçait que les François ne dormiront pas et resveille-ront leurs vieilles pretensions. Fait-il pas donc en Prince prudent et prevoyant, de nous affoiblir par nous-mesmes et nous mettre si au bas que ne luy puissions nuire, voire après sa mort ? Aussy avez-vous veu comment il s’est comporté aux secours qu’il nous a envoyez, la plus-part en papier et en esperances, dont l’attente nous a causé plus de mal que la venue ne nous a faict de bien ? Ses doublons

  1. Le duc de Savoie.
  2. L’Infante Isabelle.