Page:Satyre menippee garnier freres 1882.djvu/28

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

honnêtes gens se cherchassent pour s’aider à supporter les malheurs du temps. La célébrité de Passerat, l’illustration de Pithou, leur ouvrirent les portes du cénacle de Gillot. Là ils se trouvèrent en belle et nombreuse compagnie, tous gens de cœur, d’esprit et de talent, frappés d’une même douleur par les calamités qui affligeaient la France, animés du même désir ardent de la voir rentrer dans la voie qui seule pouvait lui assurer le repos. Ce furent Nicolas Rapin, Florent Chrestien et Pierre Le Roy, que Passerat et Pithou rencontrèrent surtout chez Gillot.

Nicolas Rapin venait du Poitou, où il était né à Fontetenay-le-Comte en 1535 ou 1540. Il fit ses études de droit à Poitiers, fut reçu avocat, et remplit la charge de vice-sénéchal à Fontenay. Achille de Harlay l’ayant connu à Poitiers, l’emmena à Paris, où il lui fit obtenir la charge de lieutenant de robe courte de la prévôté de Paris, puis enfin celle de grand prevôt de la connétablie. Sa fidélité au roi lui fit enlever sa charge par les Seize, au profit de La Morlière, l’un d’eux. Pierre de l’Estoile rapporte ce fait au mois de juillet 1588. « En ce temps, Rapin, prévost de l’hostel, fut chassé de Paris pour être bon serviteur du Roy, et dépouillé de son état, duquel la Ligue investit un larron nommé La Morlière ; de laquelle injustice il s’en revengea sur le papier par des vers, n’en pouvant avoir autre raison[1] ».

Les vers étaient, du reste, la consolation de Rapin dans toutes ses disgrâces. Ayant peu ou point de fortune, une nombreuse famille à soutenir, il supportait philoso -

  1. Journal de Henri III, Collection Petitot, t. XLV, p. 368.