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Roy tout à faict. Vous nous aviez desja faict garder nos places, et louer des boutiques en la rue Sainct-Anthoine pour le veoir passer enchaisné, quand l’ameneriez de Dieppe prisonnier[1]. Que fistes-vous de cette grande armée, grossie de tous vos secours estrangers, d’Italie, d’Espagne et d’Allemagne, sinon faire connoistre vostre foiblesse imprudente et mauvaise conduite ? n’ayant osé, avec trente mille hommes, en attaquer cinq ou six mille, qui vous firent teste à Arques, et enfin vous contraignirent lever le cul honteusement et chercher vous mesme seureté au delà de la rivière de Somme. Nous fusmes bien esbahis, quand au lieu de veoir ce nouveau Roy à la Bastille, nous le veismes dedans nos faux-bourgs avec son armée, comme un foudre de guerre qui devança nos pensées et les vostres. Mais vous vinstes à notre secours lors qu’estions asseurez qu’il ne nous feroit plus de mal ; et faut confesser que, sans la resistance que luy fit, à la porte de

  1. Le bruit avait couru à Paris qu’Henri IV était acculé en Normandie, et qu’il allait infailliblement être pris. Les chefs de la Ligue répandaient ce bruit à plaisir, et le peuple y ajoutait foi : « Même plusieurs de Paris et des plus simples, qui le croyaient ainsi, avaient arré des chambres et places pour le voir passer quand on l’amènerait lié et garotté, comme il en estoit bruit. » (Mémoires de P. de l’Estoile, sept. 1589. ) La victoire d’Arques fut une grande déception pour ces naïfs.