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pour le faire moine, suscita l’assassin, et le récompensa par avance en se livrant à lui.

Un instant la Ligue se crut victorieuse. Le roi de Navarre se disait bien roi de France par succession, sous le nom de Henri IV ; mais il était hérétique, et le pape l’avait solennellement excommunié et déclaré incapable de régner. Le duc de Mayenne, qui voulait conserver le pouvoir, se hâta de proclamer roi, sous le nom de Charles X, le cardinal de Bourbon, prince sans caractère, sans énergie, destiné fatalement à n’être qu’un instrument dans des mains ambitieuses. D’ailleurs il était prisonnier des ennemis de la Ligue qui le transportaient successivement d’Amboise à Chinon, et de Chinon à Fontenay-le-Comte. En même temps le roi d’Espagne, Philippe II, qui entretenait la Ligue de son or, réclamait la couronne de France pour sa fille, l’Infante Isabelle, petite-fille de Henri II. Il proposait de la marier à l’archiduc Ernest ; mais, sur la résistance du Parlement qui voulait maintenir la loi salique, et se refusait à admettre au trône de France un prince étranger, il offrait de la donner au jeune duc Charles de Guise, et de proclamer les deux époux rois solidairement. Mais le duc de Mayenne était secrètement opposé à cet arrangement. Il lui répugnait de voir son neveu régner sur lui : il voulait conserver le pouvoir, et, s’il ne pouvait être roi en titre, il voulait du moins régner sous le nom d’un roi de son choix, d’un roi fait par lui.

Cependant Henri IV remportait de nombreux succès, d’autant plus décourageants pour les ligueurs qu’ils étaient moins attendus. Ainsi le duc de Mayenne avait annoncé qu’il tenait le roi de Navarre acculé à la mer