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vous souviendra bien avec quelle assurance je le vous promy, et avec quels preparatifs vous les attendiez[1]. Toutesfois, quand je vey que ces Heretiques nous faisoient barbe de foirre[2], et ne se vouloient pas laisser prendre sans mitaines, je fu en Flandres pour en chercher[3], et leur laissay cependant faire cette bourrasque aux auxbourgs de ceste ville ; puis leur permy d’aller se pourmener tout l’hyver à Vendosme, au Mans, Laval, Argentan, Faleze, Alençon, Verneuil, Evreux et Honfleur, que je leur laissay tout exprés prendre, m’asseurant bien que tost aprés j’auroy tout leur butin en gros, quand ils se seroient bien morfonduz et laissez mourir de froidure. Et de faict, je leur fey bravement lever le cul à Dreux, et s’en fussent fuis, s’ils m’eussent voulu croire. Mais vous sçavez que ceste tirelaisse[4] nous couste bon : car ces meschants Politiques n’en vouloient qu’à moy, et m’eussent vilené s’ils m’eussent peu joindre ; de quoy je me sceu bien garder par le bon exemple

  1. Les Parisiens s’attendaient à voir le duc de Mayenne ramener Henri IV prisonnier, et ils avaient déjà loué des fenêtres pour assister à cette entrée.
  2. Pour gerbe de foirre ou feurre, c’est-à-dire de paille. C’est une expression proverbiale.
  3. Le duc de Mayenne alla à Bruxelles demander au duc de Parme du secours contre Henri IV, et il en obtint un assez considérable, conduit par le comte d’Egmont.
  4. Tirelaisse, sorte de jeu, par extension tromperie.