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On ne te tire pas une langue, pareille
À celle qu’un molosse allonge en haletant.
Mais toi, patricien, qui peux vivre content
Sans voir par l’occiput, crains la foule railleuse !…

l’ami.

Que dit le peuple ?

perse,

Que dit le peuple ? Il dit : Sa muse harmonieuse
Coule à flots toujours purs ; toujours, avec douceur,
Sur le poli des vers glisse un doigt connaisseur ;
Et puis, cet homme-là vous file un vers si juste,
Que, règle en main, d’un œil on dirait qu’il l’ajuste.
Faut-il peindre les mœurs ; contre un luxe insolent
Tonner ;… chanter les rois et leur festin sanglant :
Il est toujours sublime et grand, notre poëte !
Aussi, vers l’épopée une tourbe indiscrète
S’élance, qui jamais n’apprit qu’à tourmenter
Des lambeaux de vers grecs, et ne saurait chanter
Un bois, un champ fertile, ou les soins d’une ferme,
Le foyer, le bétail que son enceinte enferme ;
Ce foin brûlant qui fume, à Palès consacré ;
Le berceau de Rémus, et ton pays sacré,
Cincinnatus, ô toi qui poussais la charrue,
Lorsque, d’un pas tremblant, ton épouse accourue
Vint t’offrir la trabée, et, nouveau dictateur,
Quand tu vis ramener tes bœufs par le licteur…

l’ami.

Courage, mon poëte !