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Jusqu’à te faire dire, Assez ! n’en pouvant plus ?

l’ami.

Mais enfin nos talents deviendraient superflus,
S’ils n’éclataient au jour, comme un sauvage arbuste
Qui du rocher natal s’échappe en jet robuste ?

perse.

Le savoir, malheureux, n’est donc plus que du vent,
Si quelqu’un ne sait pas que vous êtes savant ?

l’ami.

Que la foule, du geste, en passant me désigne,
Et dise, Le voilà ! n’est-ce pas gloire insigne ?
Que mes vers soient dictés à cent jeunes garçons,
Dites-moi, n’est-ce rien ?…

perse

Dites-moi, n’est-ce rien ?… Et puis, lourds de boissons,
Les fils de Romulus, au milieu des bouteilles,
Veulent des grands auteurs connaître les merveilles.
Alors certain convive, au manteau violet,
Bégayant, nasillant, débite un chant complet
De Phyllis, d’Hypsipyle, histoires lamentables ;
Et, pour rendre des mots les sons plus délectables,
Sa voix molle et flûtée en supprime la fin.
On applaudit. Ta cendre est-elle heureuse enfin,
La pierre pèse-t-elle à tes os plus légère,
Ô poëte ! On te loue ; et la fleur bocagère,
De tes mânes sacrés, de l’urne, du tombeau,
Ne jaillit pas éclose ?…