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LIV. I. SATIRE IX.

Quand on le sait bien prendre, il n’est pas invincible ;
Et c’est pourquoi d’abord il est moins accessible.
— S’il ne tient qu’à cela, le succès est certain ;
Aujourd’hui repoussé, je reviendrai demain ;
Je corromprai ses gens ; j’assiégerai sa porte ;
J’y passerai les nuits ; et qu’il entre ou qu’il sorte,
Partout comme son ombre il m’aura sur ses pas :
Sans un peu de travail on n’a rien ici-bas.
Pendant que sur ce ton il déclame et m’assomme,
Un de nos bons amis, qui connaissait notre homme,
Fuscus Aristius m’aperçoit, vient à nous ;
On s’arrête. — Eh, mon Dieu, mon cher, d’où venez-vous ?
Où courez-vous ainsi ? Je réponds, il réplique.
Après ces vains propos, par signe je m’explique ;
Je lui fais un clin-d’œil ; je lui pince le bras,
Pour qu’il me tire enfin de ce malheureux pas.
Le traître fait semblant de ne me pas comprendre :
D’un mouvement d’humeur je ne puis me défendre :
— À propos : quel est donc ce secret entretien
Dont vous deviez tantôt… ! Je me rappelle bien ;
Mais je n’ai pas le temps de vous parler affaire.
Au peuple circoncis voudrions-nous déplaire ?
C’est aujourd’hui la Pâque ; et la discrétion…
— Que m’importent les juifs et leur religion ?
Je m’en moque, lui dis-je, et suis un incrédule.
— Et moi, de les choquer je me ferais scrupule :
Je suis peuple : à demain. — Jour cruel ! Le bourreau
S’éloigne en me laissant sous le fatal couteau.
Enfin, par un hazard que je n’attendais guère,
Du bavard en défaut arrive l’adversaire